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Sante

Santé : l'inquiétante croissance du tourisme pharmaceutique

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Malgré une autorisation de mise sur le marché annoncée en janvier 2014, le Sativex, un antidouleur à base de cannabis, n’est toujours pas disponible en France. Des malades souffrant de sclérose en plaques n'hésitent plus à aller s'en procurer à l'étranger. AFP / Almirall

Ils sont de plus en plus nombreux à partir à l'étranger acheter des médicaments. Un tourisme pharmaceutique dont s'alarment aujourd'hui les experts. Les trois académies et les trois ordres (médecins, pharmaciens et vétérinaires) lancent ce mardi un manifeste réclamant une politique internationale contre cette forme de contrefaçon.

Aller à la pharmacie, pour la grande majorité d'entre nous, se limite à une course de cinq minutes en bas de chez soi. Mais pour certains, cela signifie faire sa valise et passer une, voire plusieurs frontières pour acquérir le médicament qui va les soigner ou du moins les soulager. On connaissait le tourisme médical pour se faire poser des implants dentaires ou un anneau gastrique, voici le tourisme pharmaceutique.

Un phénomène encore émergent mais qui inquiète.

Pourquoi partir, parfois au bout du monde, acheter des médicaments ? Parce qu'ils sont moins chers ou tout simplement introuvables en France. Le risque ? Acheter un traitement falsifié qui n'aura peut-être aucun effet ou, pire, empoisonnera. Un danger qui est, ce mardi, au cœur d'une réunion entre les trois académies et les trois ordres (médecins, pharmaciens et vétérinaires) qui signent, à Paris, un manifeste réclamant une politique internationale contre cette forme de contrefaçon.

« Les riches pays du Nord vont se faire soigner dans les pays du Sud ! »

Si la tendance n'est pas chiffrée, les experts notent une augmentation de ces voyages, notamment à travers les saisies dans les aéroports de produits importés par des particuliers — ce qui est interdit — mais aussi par des trafiquants qui inondent l'Europe de copies. Sans compter les achats sur Internet, « pratique qui explose », selon l'Académie de médecine. 

Les difficultés d'accès aux nouveaux traitements chers, tels que le Sovaldicontre l'hépatite C, poussent les médecins à sélectionner les bénéficiaires et à conseiller aux autres de se faire soigner... à l'étranger. C'est ainsi que des patients se rendent dans des pays comme l'Inde où s'organisent de véritables filières — légales — de soins spécialisés. « Un incroyable renversement de tendance, s'inquiète Médecins du monde : les riches pays du Nord vont se faire soigner dans les pays du Sud ! »

Parmi les patients prompts à franchir les frontières, il y a aussi ceux qui n'ont pas accès aux médicaments parce qu'ils sont interdits en France. Les malades atteints de sclérose en plaques par exemple. Las d'attendre le Sativex promis depuis janvier 2014 par les autorités, certains vont chercher ailleurs ce spray à base de cannabis destiné à soulager leurs douleurs.

Dans ce contexte, mi-mars, 110 cancérologues ont signé un appel contre le prix de certains traitements, visant les profits jugés indécents de l'industrie pharmaceutique. En juin, lors du G 7 au Japon, François Hollande incitera à adopter une position commune contre l'inflation de ces prix. Objectif ? Faire en sorte que les patients puissent bénéficier de leur traitement dans leur propre pays.
 

Ce qu'il faut savoir
Traitement trop cher ou introuvable en France... La tentation peut être grande de partir ailleurs chercher ses médicaments. Attention toutefois...

Quels médicaments ?

Il s'agit de certains produits indisponibles en France, comme un antidouleur à base de cannabis, mais aussi des molécules plus banales. « J'ai enfin découvert un produit contre le mal de mer efficace lors d'un voyage en Egypte. Depuis, à chaque fois que des amis y vont, je passe commande. Il est disponible sans ordonnance pour quelques euros », raconte Valérie, une Seine-et-Marnaise adepte de la plongée sous-marine.

Mais, c'est nouveau, cette pratique est aussi liée au coût des nouvelles thérapies, qui oblige l'Assurance maladie à une prise en charge sélective des malades. C'est le cas du Sovaldi. Arrivé en 2014, ce traitement contre l'hépatite C est facturé à la Sécurité sociale... 41 000 € par patient pour trois mois de traitement, alors qu'on trouve en Inde sa version générique pour 900 €. « La France compte 250 000 cas d'hépatite C, dont 140 000 ont un besoin pressant de traitement. Pour raisons financières, seuls 26 000 cas ont été traités à ce jour », dénonce Yann Mazens, responsable de SOS Hépatites, qui appelle « les exclus des soins » à se faire connaître de l'association. L'inquiétant, c'est que le prix des nouvelles thérapies explose. Trop complexes dans leur mode d'administration pour se prêter à l'automédication, les anticancéreux ne suscitent pas de tourisme pharmaceutique. Mais demain ?

Quels dangers ?

S'agissant des médicaments contrefaits, achetés dans la rue, le risque pour la santé est réel. « Toutefois, si vous connaissez le nom de la molécule, le nom commercial du produit ou de sa version générique, si vous allez dans une pharmacie... même au bout du monde, vous prenez peu de risques. A Médecins du monde, nous prescrivons des génériques à nos patients partout dans le monde, même contre l'hépatite C, et ça marche », relativise Olivier Maguet. L'administrateur de Médecins du monde, responsable de la campagne sur le prix des médicaments, dénonce d'ailleurs la faiblesse des autorités « qui ont laissé les laboratoires dicter leurs prix ».

Est-ce légal ?

Selon les douanes, « si le médicament est autorisé en France, on peut l'importer pour son usage personnel », l'idéal étant de pouvoir présenter une ordonnance au retour. Si le médicament n'est pas autorisé mais que le malade présente une ordonnance et que le produit est en petite quantité pour son usage personnel, dans les faits, le patient ne risque pas grand-chose. En revanche, si l'acheteur détient des médicaments contrefaits, l'infraction peut être punie de peines pouvant s'élever jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 500 000 € d'amende auxquelles peuvent s'ajouter les dommages et intérêts.

Quid des contrefaçons ?

Les principaux médicaments qui sont falsifiés sont les antipaludiques, les antibiotiques, les antirétroviraux, mais aussi ceux contre le diabète, le cholestérol et l'hypertension artérielle. Enfin, certains préfèrent acheter, sur Internet, des produits qu'ils n'osent pas se procurer chez le pharmacien, comme le Viagra ou des traitements amaigrissants, et qui peuvent aussi être contrefaits.

L'Asie en première ligne
Dans quels pays va-t-on acheter son traitement quand celui-ci n'est pas disponible en France ?
La filière générique indienne. Concernant les médicaments fiables, il suffit le plus souvent d'observer la carte des pays qui produisent des génériques pour savoir où les patients vont se fournir. Considérée comme la plus grande pharmacie discount du monde, l'Inde arrive largement en tête. Mais on trouve également le Bangladesh, l'Egypte et dans une moindre mesure le Maroc.

Des filières de soins low-cost. L'arrivée du Sovaldi, qui ne nécessite que trois mois de traitement pour soigner une hépatite C, a suscité dans certains pays la création de vraies filières de soins. C'est le cas en Inde, où des hôpitaux de New Delhi ou de Bangalore proposent un service clé en main (hébergement compris), profitant du prix dérisoire du générique du Sovaldi produit localement.

Déjà des centrales d'achats en Australie. Dans certains pays, les malades se sont organisés pour créer des centrales d'achats de médicaments, se fournissant là où ils sont le moins cher. Une telle organisation parallèle s'est ainsi constituée en Australie, certains de ses membres se chargeant des allers-retours pour revenir les valises pleines de produits bon marché.

Des contrefaçons surtout chinoises. S'agissant des importations de produits contrefaits, leur origine est à peu près identifiée : la production vient d'Asie, essentiellement de Chine, mais aussi d'Inde, là encore. Cette industrie illégale rapporte... vingt fois plus que la drogue.



1 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Avril, 2016 (11:00 AM)
    Moi j'aimerais bien aller a Cuba traiter mon vitiligo, il parait qu'ils sont les seuls a le soigner  :question: 
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