Une expression wolof, donc bien de chez nous, dit que « ku wakh feeñ ». Autrement dit, il suffit de parler pour se découvrir… ne serait-ce qu’un tant soit peu. Ainsi, si le groupe français Suez, numéro deux mondial de l’Eau, avait avancé masqué — et muet — jusque-là, il lui est difficile à présent qu’il est attributaire « provisoire » du marché de production, gestion et distribution d’eau dans les grandes villes de notre pays, de continuer à garder le silence. Il se met donc à communiquer. A travers notamment l’hebdomadaire « Jeune Afrique » qui consacre, dans son numéro en vente cette semaine, une double page à ses ambitions africaines. On y apprend que Suez, au-delà du marché sénégalais, a entrepris une reconquête de l’Afrique qui vise aussi le Bénin, l’Angola et surtout, le Nigeria. Et pas seulement en tant que fournisseur de conseils et constructeur d’usines d’eau mais surtout comme délégataire du service public de l’eau, une activité qu’il n’a encore jamais exercée au sud du Sahara. Justement, il va en faire l’apprentissage dans notre pays, dont il entend faire sa vitrine en Afrique, avant d’exporter l’expérience ainsi engrangée dans d’autres parties du continent. Malgré cette virginité de ce côté-ci du Sahara, pourtant, la commission de dépouillement de l’appel d’offres lancé par le ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement — en vue de choisir le fermier chargé de distribuer l’eau dans nos grandes villes — a trouvé le moyen de qualifier haut la main, sur le plan technique, le groupe dirigé par M. Jean Louis Chaussade. Mieux, elle aurait même failli, d’après les « avocats » de M. Mansour Faye, disqualifier, dans cette même étape technique, la Sénégalaise des Eaux qui a pourtant fini de faire ses preuves dans la matière concernée par l’appel d’offres !
Ou il y a des choses qu’on nous cache, ou alors on nous doit des explications…
Bien évidemment, ce qui a surtout scié, pour ne pas dire interloqué, les observateurs un tant soit peu critiques — et même une bonne partie de l’opinion —, c’est le fait que le groupe Suez ait été déclaré attributaire provisoire de ce fameux appel d’offres malgré un prix du mètre cube d’eau nettement supérieur à celui de la SDE (298,50 francs contre 286,90 francs). A en croire « Jeune Afrique », à cette objection, le directeur général adjoint de Suez chargé des zones Afrique, Moyen-Orient, Inde et Pacifique, M. Bertrand Camus, oppose l’argument selon lequel l’offre de son groupe serait « plus cohérente ». On croirait entendre M. Mamadou Dioukhané, le président de la commission de dépouillement et proche collaborateur du ministre Mansour Faye ! Devant le tollé soulevé par l’attribution provisoire de ce marché à centaines de milliards sur 15 ans à une société classée deuxième au niveau de l’offre financière, ce haut fonctionnaire avait argué qu’au-delà de l’argument financer, c’est la « cohérence globale » de l’offre de Suez qui avait emporté l’assentiment de la commission. De deux choses l’une : on bien l’on considère que les beaux esprits se sont rencontrés ; ou alors, force est de constater qu’à tout le moins on a dû échanger des arguments ou des éléments de langage entre la commission sénégalaise et les dirigeants de Suez ! Une chose est sûre : si ce groupe français remportait en définitive ce premier marché de délégation de service public d’eau en Afrique noire, une jurisprudence aurait été créée en matière de passation de marchés. Il suffirait désormais de brandir l’argument imparable de la « cohérence globale » en lieu et place du « moins disant » ou du mieux disant » pour pouvoir justifier toutes les turpitudes, toutes les magouilles. Et faire gagner qui l’on veut.
Des milliards de francs perdus de vue… ou pas par tout le monde, et « guissané » à la Selbé Ndom !
L’article de « JA » nous révèle d’autres choses intéressantes à propos de cet appel d’offres sénégalais. On apprend en effet que Suez a engagé « plusieurs millions d’euros » (ah bon ?) dans l’appel d’offres avec « plus d’une cinquantaine de collaborateurs qui ont travaillé sur le dossier pendant près de trois ans ». Outre qu’on se demande où ont bien pu passer ces « millions d’euros » qui ont été dépensés dans la préparation de cette offre de Suez, on se dit que ce groupe devait être vachement initié pour plancher depuis « près de trois ans » sur un appel d’offres lancé depuis… moins de deux ans. C’est sans doute de la prescience ou alors les gars de Suez ont dû lire dans une boule de cristal que le Sénégal allait lancer un appel d’offres. Car nous sommes sûrs que Mansour Faye ne leur a rien dit !
En passant, on pourrait toujours se demander ce qui aurait brusquement décidé un groupe — qui n’a plus postulé pour aucune délégation de service public depuis des lustres « par aversion pour le risque héritée de ses déboires dans des pays émergents au cours des années 2000 » ainsi que l’écrit l’hebdomadaire basé à Paris —, on se demande donc ce qui aurait brusquement poussé un tel groupe à se réveiller pour soumissionner à un appel d’offres au Sénégal ? Parce que toute perspective de « risque » était exclue à l’avance ?
Pour bien montrer que Suez a mis tous les atouts de son côté, l’article nous informe que « toutes les têtes d’affiche du groupe ont mis la main à la pâte comme Diane Binder (Ndlr, membre du Conseil présidentiel pour l’Afrique mis en place par le président Macron) ou Eric Ghebali ». Ah bon, un collaborateur du président français qui joue les Vrp sur le continent ? Et nous qui croyions que ces pratiques de la Françafrique étaient révolues depuis l’arrivée au pouvoir du président Macron !
Last but not least, le DGA du numéro deux mondial de l’eau confirme ce que l’on savait déjà à savoir que c’est son groupe, via sa filiale Degrémont, qui a construit toutes les usines d’eau du Sénégal : Keur Massar 1, Keur Massar 2 et Keur Massar 3. Ce dernier marché, d’un montant de 61 millions d’euros (40 milliards de francs environ) ayant été remporté en mai 2018 seulement. Cinq mois après, Suez était déclaré adjudicataire provisoire du marché d’approvisionnement en eau des villes du Sénégal. Si cette attribution était confirmée, le bienheureux groupe français gérerait donc toute la chaîne de l’approvisionnement de l’eau dans notre pays. De la construction des usines à la production, le transport et la distribution ! Autrement dit, il aurait donc le beurre, l’argent du beurre, la fermière (on parle d’affermage !) et même la fille de cette dernière ! Car pourquoi se gêner tant qu’on y est…
Mamadou Oumar NDIAYE
38 Commentaires
Anonyme
En Novembre, 2018 (18:30 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (18:39 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (18:43 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (18:53 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (19:00 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (19:02 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (19:06 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (19:09 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (19:13 PM)Marvel
En Novembre, 2018 (19:21 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (19:46 PM)Comment un Etat souverain, peut-il délibérément fuir ses responsabilités régaliennes et confier de la construction d'usine à la production, en passant par le transport et la distribution de l'eau à des étrangers? Donc demain pour défendre notre pays et notre souveraineté (du moins ce qu'il en reste), on entre en guerre, la France nous assoiffe comme elle le veut et quand elle veut, c'est ça? De facto, nous avons donc perdu notre indépendance, puisqu'il est clair que décision ne saurait être prise si elle n'arrange pas celui qui vous donne à boire.
Je rappelle au président de la république que conformément à l'article 39 de la constitution de notre république : "Il est le garant de l'indépendance nationale et de
l'intégrité du territoire. Il est responsable de la défense nationale. "
Rappelons aussi que toute dérogation à ce sacerdoce n'est que Haute Trahison. Et l'unique expiation de la Haute Trahison demeure la fusillade publique, purement et simplement.
Halte au bradage de notre pays ! Nous ne sommes pas à vendre. Une purge totale de tous ces faussaires s'impose.
Anonyme
En Novembre, 2018 (20:44 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (20:59 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (21:05 PM)Dëgg-rekk
En Novembre, 2018 (21:15 PM)Ils viennent pas pour notre intérêt...
Pourquoi pas acheter des usines d’eaux clé en main et les gérer nous mêmes, quitte à les donner à dés créatins , mais qu’ils soit des nationaux. L’eau, électricité et la nourriture, on ne dois pas les laisser avec des mains étrangères, surtout pas françaises
Dëgg-rekk
En Novembre, 2018 (21:15 PM)Ils viennent pas pour notre intérêt...
Pourquoi pas acheter des usines d’eaux clé en main et les gérer nous mêmes, quitte à les donner à dés créatins , mais qu’ils soit des nationaux. L’eau, électricité et la nourriture, on ne dois pas les laisser avec des mains étrangères, surtout pas françaises
Dëgg-rekk
En Novembre, 2018 (21:15 PM)Ils viennent pas pour notre intérêt...
Pourquoi pas acheter des usines d’eaux clé en main et les gérer nous mêmes, quitte à les donner à dés créatins , mais qu’ils soit des nationaux. L’eau, électricité et la nourriture, on ne dois pas les laisser avec des mains étrangères, surtout pas françaises
Dëgg-rekk
En Novembre, 2018 (21:15 PM)Ils viennent pas pour notre intérêt...
Pourquoi pas acheter des usines d’eaux clé en main et les gérer nous mêmes, quitte à les donner à dés créatins , mais qu’ils soit des nationaux. L’eau, électricité et la nourriture, on ne dois pas les laisser avec des mains étrangères, surtout pas françaises
Anonyme
En Novembre, 2018 (21:31 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (23:18 PM)Bel article
Anonyme
En Novembre, 2018 (23:18 PM)Bel article
Doudou
En Novembre, 2018 (01:25 AM)Monsieur oumar ndiaye JA est accessible. Attention !
Quand vous rapportez il faut le faire fidèlement. Sinon c'est du non respect ou de la fumisterie.
La Sde s est lourdement trompée pensant qu'il n'y aurait pas appel d offre.
La sde a renouvelé deux fois son contrat sans appel d offre avec les gouvernements de Diouf et de Wade.parce que coïncidant à chaque fois avec des périodes électorales.et ces deux gouvernements n ont jamais voulu prendre le risque de tension sociale que cela peut engendrer.si dans les mêmes conditions aujourd'hui le gouvernement du président Sall pour la transparence et la rigueur pour une bonne gouvernance lance un appel d offre on ne doit que saluer ce courage politique. Sde, suez sont toutes des entreprises françaises.
Le pouvoir du verbe peut être diabolique.
A bas les idées partisanes.
Que Allah protège le Sénégal.
Le Pollueur
En Novembre, 2018 (07:53 AM)Espérons que vous fassiez des jaloux pour que les autres journalistes revoie leur style de communication.
Anonyme
En Novembre, 2018 (10:55 AM)Anonyme
En Novembre, 2018 (13:33 PM)La SDE n'est pas une société sénégalaise, comme son nom semble l'indiquer, elle est contrôlée par des capitaux étrangers à plus de 60 pourcent pour ne pas dire 75pct.
L'État et les populations doivent veiller à la qualité du service et du prix.
Les contrats doivent être passes en revu tous les 2 ans pour voir si tous les termes du contrat sont respectés. A défaut les résilier après sommation avec délais de correction des dysfonctionnements.
L'eau est trop importante, pour nous parler de société sénégalaise ou étrangère.
Anonyme
En Novembre, 2018 (13:33 PM)La SDE n'est pas une société sénégalaise, comme son nom semble l'indiquer, elle est contrôlée par des capitaux étrangers à plus de 60 pourcent pour ne pas dire 75pct.
L'État et les populations doivent veiller à la qualité du service et du prix.
Les contrats doivent être passes en revu tous les 2 ans pour voir si tous les termes du contrat sont respectés. A défaut les résilier après sommation avec délais de correction des dysfonctionnements.
L'eau est trop importante, pour nous parler de société sénégalaise ou étrangère.
Anonyme
En Novembre, 2018 (14:08 PM)SUEZ sur l’eau de ce pays prouve encore ce que je dis ici, pratiquement tout le secteur formel du Sénégal est sous monopole français. L’Afrique continue d’etre le même “gâteau que les européens se sont partagés en Allemagne dans le bureau du chancelier Bismarck. Ce même partage de nos ressources se poursuit impunément aujourd’hui. Et on nous dit que l’Afrique est mal partie! À juste titre, comment pouvons-nous partir quand nous n’avnos aucun contrôle sur nos propres ressources?
Anonyme
En Novembre, 2018 (14:09 PM)SUEZ sur l’eau de ce pays prouve encore ce que je dis ici, pratiquement tout le secteur formel du Sénégal est sous monopole français. L’Afrique continue d’etre le même “gâteau que les européens se sont partagés en Allemagne dans le bureau du chancelier Bismarck. Ce même partage de nos ressources se poursuit impunément aujourd’hui. Et on nous dit que l’Afrique est mal partie! À juste titre, comment pouvons-nous partir quand nous n’avnos aucun contrôle sur nos propres ressources?
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En Novembre, 2018 (14:49 PM)2015
Le groupe français Bouygues a cédé ses parts dans la Sénégalaise des Eaux, société qui a la responsabilité exclusive de la production et de la distribution d’eau potable au Sénégal. l’opération a été scellée le 31 juillet
Via la SAUR, Bouygues était un actionnaire historique de cette entreprise, qui produit l’eau potable du Sénégal et la distribue à plus de 600 000 foyers à travers le pays.
D’après le procès-verbal du conseil d’administration, le groupe français, qui cherchait à se retirer depuis plusieurs années, a cédé à trois filiales d’AXA (France, Suisse et Italie) les 18,63% qu’il détenait encore dans le holding Eranove (ex Finagestion), basé à Paris et détenteur de plusieurs actifs énergétiques en Afrique subsaharienne francophone, principalement au Sénégal (la SDE) et en Côte d’Ivoire (CIE, Ciprel et Sodeci) mais aussi au Mali et en RD Congo.
Les administrateurs représentant Bouygues (dont Olivier Bouygues) ont été remplacés par AXA Reim, la filiale du groupe d’assurance dédiée à l’investissement immobilier, et par Philippe de Martel, l’un de ses dirigeants.
Eranove reste majoritairement détenu (autour de 57%) par le capital-investisseur Emerging Capital Partners, qui avait racheté en 2008 et 2009 la majorité du capital du holding à Bouygues.
Anonyme
En Novembre, 2018 (15:22 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (15:22 PM)@22-24
En Novembre, 2018 (16:24 PM)Bouygues est un groupe industriel diversifié organisé autour de 3 pôles d'activités :
- construction (78,3% du CA) : activités loisirs et d'aménagement urbain (45% du CA ; Colas ; n° 1 mondial de la route), de BTP et de travaux publics de réseaux, de génie électrique et thermique et de maintenance d'installations (44,5% ; Bouygues Construction), et de construction et entretien d'infrastructures de transport et de promotion immobilière (10,5% ; Bouygues Immobilier) ;
- télécommunications (15,4% ; Bouygues Telecom) : prestations de téléphonie mobile, de téléphonie fixe, d'accès à Internet, etc. ;
- médias (6,3% ; TF1).
La répartition géographique du CA est la suivante : France (63,8%), Europe (15,2%), Amérique du Nord (9,1%), Asie-Pacifique (4,9%), Afrique (3,5%), Océanie (2,4%), Amérique centrale et du Sud (0,6%) et Moyen Orient (0,5%).
Voir actionnariat sur leur site : +finance/donnees-financieres/actionnariat-du-groupe/
Anonyme
En Novembre, 2018 (16:30 PM)Un pays qui confie ses telecommunication, ses banques, son approvisionnement en eau, en Energie à des ex-colonisateurs peut -il pretendre etre independant? Strictement avec Orange, la France sait tout ce qui se fait au plus haut niveau de l'etat... Quels miserables dirigeants rien que des laquais..
Anonyme
En Novembre, 2018 (17:14 PM)Moussa
En Novembre, 2018 (17:15 PM)La SDE a perdu depuis le desengagement de la SAUR.
Sans l'apport technique de SAUR, la SDE etait à la derive. Ceci explique sa demande d'assistance techniqud à SUEZ. .
SDE a creusé sa propre tombe.
Anonyme
En Novembre, 2018 (17:26 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (22:07 PM)Anonyme
En Novembre, 2018 (23:12 PM)Participer à la Discussion