ENTREE INAUGURALE SUR LE MARCHÉ FINANCIER : Le Sénégal, « l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire»

L’entrée du Sénégal sur le marché financier international n’aurait pas été des plus réussies, d’après un spécialiste de la notation boursière.

Le Sénégal serait mal inspiré en matière d’emprunts obligataires internationaux, d’après un spécialiste en notation boursière. «Le Sénégal est considéré, partout dans le monde, comme l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire» lorsqu’il s’agit d’émettre un emprunt obligataire sur des places boursières fortes comme Londres, Paris, New York, etc. C’est du moins ce qu’a confié le directeur général de West african rating agency (Agence de notation ouest africaine), Seydina Tandian, samedi à Dakar, lors d’une présentation sur la «Notation financière et pratiques boursières».

Lors de cette rencontre à l’initiative conjointe du Collectif des journalistes économiques du Sénégal (Coges) et de la Fondation Fredrich Ebert, M. Tandian rapporte une anecdote à propos du pays. Il explique qu’au cours d’un groupe de travail à la Banque africaine de développement (Bad) sur les pratiques boursières, le sujet à traiter était : «Le Sénégal, l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire». Le pays avait émis en 2009 un emprunt obligataire de 200 millions de dollars sur la place de Londres. Le ministère de l’Economie et des Finances s’était fendu par la suite d’un communiqué vers mi-décembre de la même année pour se réjouir du «succès» de l’opération qui aurait permis à l’Etat du Sénégal de lever 90 milliards de francs Cfa. Le ministre Abdoulaye Diop soulignait que cela «démontre la qualité de la signature du Sénégal et la capacité du Sénégal à diversifier ses sources de financement». M. Diop soutenait que 50 investisseurs ont participé à cette émission qui aurait été «sur-souscrite».

Or, de l’avis de l’expert en notation Seydina Tandian, le Sénégal qui faisait une telle opération pour la première fois a «raté son entrée financière dans le marché». M. Tandian explique que le pays s’y est engagé alors qu’il est noté dans la catégorie des pays à la signature incertaine (B+), autrement dit l’Etat n’est pas à l’abri d’un défaut de respect de ses engagements financiers à terme. Il s’y ajoute, poursuit-il, que le moment choisi pour émettre l’emprunt posait problème, c’est-à-dire au moment où «les investisseurs sont en vacances». M. Tandian estime aussi que la somme demandée était dérisoire. Résultat des courses, «le Sénégal a eu toutes les peines à lever les fonds». A en croire M. Tandian, le Gabon et le Ghana, qui avaient inauguré leurs émissions internationales en 2007, auraient obtenu en pleine crise plus qu’ils n’en demandaient (sur-souscrits), respectivement 100 milliards Fcfa et 750 millions de dollars. De plus, pendant que l’Etat gabonais a concédé un taux d’intérêt de 5,5 % net sur la période 2007-2013, le Ghana 8,5% sur 10 ans, le Sénégal a fixé la barre à 8,75 % avec l’échéance 2014. Ainsi, c’est parce qu’elle est moins fiable que la signature du Sénégal vaut plus cher.