Samedi 20 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Education

« Le programme Jangandoo vient à son heure au Sénégal », selon un expert en éducation

Single Post
« Le programme Jangandoo vient à son heure au Sénégal », selon un expert en éducation

Le Professeur Meissa Bèye, Directeur du Cabinet d’appui pour la recherche en éducation et la formation au Sénégal (CAREEF) une ONG basée à Rufisque (30 km de Dakar), se prononce, dans un entretien exclusif à APA, la pertinence du programme Jangandoo, une initiative du Laboratoire de recherche sur les transformations économiques et sociales (LARTES) de l’Institut fondamental d’Afrique noire Cheikh Anta Diop (IFAN).

 

 

Question : M. Beye quelle est l’Importance du programme Jangandoo pour le système éducatif au Sénégal?

 

Réponse : Le programme Jangandoo vient à son heure parce que simplement des évaluations faites par des experts ont été réalisées dans le système éducatif sénégalais, soit à travers le PASEC (Programme d’amélioration du rendement scolaire des pays de la Confemen (Conférence des ministres de l’éducation nationale en Afrique), soit le système national d’évaluation des rendements scolaires, soit des outils EGRA (early grade reading assessment) que la fondation Flora et Wiliam Hewett a expérimenté au Sénégal. Toutes ces évaluations ont montré des insuffisances dans la maîtrise des compétences fondamentales, surtout en lecture. La dernière donne, c’est qu’un élève sur cinq n’a pas pu lire, selon l’outil EGRA, un texte standard au CE1 (cours élémentaire). 

 

Si l’on sait que la lecture est la clé du savoir, il y a là un problème fondamental pour à la fois le rendement interne du système mais aussi le rendement externe. Il y a là un problème lié à la qualité sous l’angle de l’efficience et de l’efficacité. Quand on ne sait pas lire, on ne peut rien capitaliser ni sur le plan du calcul, ni sur le plan de la compréhension. Donc on est pratiquement diminué et annihilé dans la conquête du savoir. 

 

 

Question : A votre avis, où se situe l’originalité de ce programme ?

 

Réponse : La qualité que vise le programme Jangandoo est essentielle. C’est un problème d’ailleurs qui ne touche pas seulement le système éducatif sénégalais. Partout, la qualité, qui est une quête perpétuelle, pose problème qu’il s’agisse de la France, de l’Inde, des USA et des pays nordiques. C’est un projet d’amélioration constante.

 

Au regard de ce que nous constatons au Sénégal, qu’on mette 40% du budget, risque de déséquilibrer les structures macro-économiques au détriment de certains secteurs. Notre école n’est pas rentable. Aujourd’hui, se pose même le problème de l’utilité sociale de l’école. Ceux qui sont passés à l’école est ce qu’ils ont encore fait en sorte qu’on puisse compter sur l’école comme valeur ajoutée ?. 

 

Regardez les modèles de réussite. Ce ne sont pas souvent des produits de l’école. Je ne dis pas que ce sont des modèles peut être à imiter. Mais en tout état de cause, aujourd’hui on constate que nos élèves, nos étudiants, soit ils sont des diplômés chômeurs, soit ils sont exclus à la fin du cursus élémentaire ou du moyen secondaire. Le plus grave, c’est qu’on a beaucoup d’étudiants chômeurs maintenant. Est-ce que nous allons attendre que l’explosion sociale débouche sur une chose irréparable ? 

 

En tout cas, le laboratoire Lartes qui a le sens de la prospective en regard du rôle que peut jouer l’université, nous a invités à participer à un programme que nous jugeons essentiel pour l’avenir du système éducatif. C’est dans ce sens là que nous nous sommes investis à Rufisque avec des enseignants retraités, des ONG, des associations de parents d’élèves pour pouvoir porter le plaidoyer. 

 

 

Nous pensons qu’à terme l’enquête nous révélera beaucoup d’insuffisances. Donc son originalité réside dans le fait qu’on rentre par les ménages. C’est très déterminant, les conditions de vie des enfants. C’est tout aussi déterminant, essentiel, que les conditions d’études et de travail dans les écoles. L’un mis dans l’autre, avec les données croisées, nous pourrons peut être mettre sur la table les éléments qui disent que pour booster la qualité voilà ce qu’il faut toucher du doigt. Donc à l’instar de l’Inde, du Mali, le Sénégal va faire un saut qualitatif pour améliorer son système éducatif.

 

 

Question : En quoi le programme Jangandoo peut changer la donne de l’éducation au Sénégal ?

 

 

Réponse : Le programme Jangandoo peut changer, si nous croyons aux résultats de la recherche-action, fondamentalement la base de données au niveau des décideurs. Parce que nous aurons à l’issue de l’enquête dans la phase pilote sur les quatre régions (Dakar, Diourbel, Saint-Louis et Kolda), un ensemble d’indicateurs qui vont confirmer ou infirmer les tendances que les précédentes évaluations ont eu à révéler. Nos élèves ne savent pas lire. Pourquoi ? Le programme Jangandoo va donner quelques types de réponses aussi bien dans le formel que dans le non formel. Et nous allons mettre dans la corbeille tous ces éléments qui vont permettre aux élus locaux de jouer leur rôle dans le contexte d’une éducation décentralisée, dans l’élaboration de leur budget. Ces élus locaux vont être sensibilisés sur un paquet de services (mixité dans les toilettes, entretien préventif dans les écoles, problèmes d’eau, électricité etc.). 

 

Quand on verra que le système éducatif a un rendement inférieur dans une localité telle que la ville de Rufisque par rapport aux standards de qualité, l’inspecteur d’académie va actionner certainement les performances des élèves à l’intérieur des classes par rapport à des stratégies innovantes de lecture, de calcul, de prise en compte des chaînes cognitifs qui permettent à l’élève de mieux étudier. Le parent sera sensibilisé et il verra comment encadrer son enfant. 

 

Dans l’élaboration du Plan local de développement ou du Plan départemental de développement, c’est autant d’indicateurs qui vont constituer des valeurs ajoutées pour essayer de booster la qualité. Mais il faut que les inspections, les syndicats et les associations de parents d’élèves forment un grand lobby pour dire aux décideurs que ce qui plombe la qualité de l’éducation. Nous aurons le mérite d’avoir indiqué la direction à l’instar de l’étoile polaire.

 

 

Question : Pendant trois jours vous avez eu à former les animateurs qui vont mener les enquêtes de terrain. Peut-on avoir leur profil et quelle a été leur motivation à faire cette formation ?

 

 

Réponse : Le LARTES nous laissé le choix de recruter des animateurs. Comme nous sommes un laboratoire dirigé par des universitaires, des professionnels de l’éducation, on nous avait demandé dans le profil, le niveau du Brevet. Nous l’avons rehaussé au niveau du Baccalauréat parce que simplement, nous voulons survaloriser par rapport au travail qui nous a été confié sur le profil des animateurs. Vous trouverez dans la salle des étudiants qui ont le DEA (Diplôme d’études approfondies), d’autres qui ont la licence, tout autant que vous trouverez des instituteurs et enseignants retraités qui capitalisent une expérience de près de 40 ans dans le système éducatif. Il y a aussi des mères de famille ainsi que des personnes qui ont l’habitude de procéder à des enquêtes dans le cadre des écoles communautaires ou de l’alphabétisation.

 

Le plus fondamental dans la motivation des animateurs, c’est qu’ils participent à un combat, un défi. Le LARTES a confiance au CAREEF et cette confiance on la dépose entre la main des animateurs pour pouvoir faire un travail scientifiquement reçu et sociologiquement acceptable sur la base de la formation que nous avons eu à faire. C’est conscient de ces enjeux-là que nous avons estimé que le profil devrait être relevé. Eux mêmes, à l’issue de la troisième journée, ont élaboré un code de conduite et d’éthique pour pouvoir entrer dans les ménages. L’autre élément déterminant c’est que tous, qu’il s’agisse de Guédiawaye (banlieue dakaroise), Yenne (45 km de Dakar), ce sont des zones de leur propre milieu. Nous l’avons fait pour qu’ils ne soient pas des corps étrangers dans les ménages qu’ils enquêtent.

 

Le CAREEF travaille principalement dans la zone de Guédiawaye qui constitue un microcosme très hétéroclite par rapport à plusieurs paramètres sociologiques parmi lesquels la diversité de l’habitat, les signes de pauvreté et de richesse. Le département compte la ville de Guédiawaye et les cinq arrondissements. Comme c’est une phase test, nous avons demandé à nos enquêteurs de nous proposer un miroir réfléchissant des problèmes de Guédiawaye par le choix de quelques quartiers dans trois arrondissements au maximum. L’échantillonnage est essentiel. Il doit être le reflet de la réalité.

 

A Rufisque, nous n’avons pas beaucoup de problèmes parce que la ville compte trois arrondissements où sont dispersés nos enquêteurs en ayant le soin de faire le focus sur l’arrondissement le plus représentatif.

 

Nous avons enfin la zone de Yenne qui est une zone littorale maritime. C’est la seule zone de la région de Dakar qui est à la fois maritime et littorale. Nous aurions aimé aller sur la zone pastorale dans l’hinterland vers Sangalkam, Gorom et autres. Mais vous savez les problèmes qui sont survenus dans ces localités. Nous ne voulons pas aller dans des terrains où nos enquêteurs seraient suspectés ou auraient des problèmes. 

 

 

Question : Quels sont les objectifs que le programme Jangandoo a assigné au CAREEF dans le cadre des enquêtes ?

 

 

Réponse : Les animateurs, qui sont au nombre de 20, sont regroupés en binôme mixte (une femme/un homme). Nous on nous a demandé d’enquêter sur 10 ménages. Mais pour une approche scientifique de la recherche-action, nous avons demandé 15 ménages parce qu’il peut arriver que l’enquête ne soit pas complète où qu’il y ait des erreurs. Nous avons dans notre base de données la possibilité de changer. Si vous faites la multiplication, on a 20 enquêteurs et on demande à chaque binôme 15 ménages, vous voyez que ce sera 300. Nous allons essayer pour chaque enquêteur d’être le plus près possible dans le cadre de la supervision pour minorer les erreurs. C’est pourquoi à la fin de la dernière séance et avant la cérémonie de clôture de la formation, nous allons faire des simulations in situ dans deux familles. Par ce que quand vous prenez en formation des adultes il faut avoir une dynamique interactive et participative.



2 Commentaires

  1. Auteur

    Ndiaye Wassoul

    En Mai, 2012 (07:44 AM)
    C'est bien l'initiative et que tout savoir commence par la lecture. Il faudrait créer des groupes de niveau en lecture dans nos écoles et faire des rotations et des bilans , vous verrez des résultats immédiats car je parle en connaissance de cause et en expérimentateur

    Top Banner
  2. Auteur

    Punk Andersonn

    En Juin, 2013 (22:23 PM)
    VIVE JANGANDOO

    {comment_ads}

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email