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La stratégie vaccinale française est "bonne mais..."

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Dans une unité de production d'adjuvant pour le vaccin du Covid-19 de GlaxoSmithKline, à Saint-Amand-les-Eaux dans le nord de la France, le 3 décembre 2020
À l’heure où les campagnes de vaccination commencent au Royaume-Uni et en Russie, la France dévoile les premiers contours de sa stratégie vaccinale pour lutter contre le Covid-19. Qu’en pensent les chercheurs et virologues ? La stratégie divise.
Ne pas confondre vitesse et précipitation. C’est en substance le mot d’ordre que le gouvernement français semble vouloir afficher à l’égard de sa stratégie vaccinale. Alors que la Russie a commencé le 5 décembre à injecter son vaccin Spoutnik V dans 70 centres ouverts à Moscou et que le Royaume-Uni administre ses premières doses de vaccins contre le Covid-19 mardi 8 décembre dans tout le pays, la France dévoile progressivement sa stratégie vaccinale.  

La stratégie française : priorité aux personnes âgées  

Le 6 décembre, le professeur Alain Fischer, nommé par le gouvernement pour piloter la stratégie vaccinale, a révélé dans les colonnes du JDD les premières pistes de la stratégie française. Le calendrier vaccinal devrait donc se dérouler en trois phases et débuter dès le 4 janvier 2021 en commençant par les personnes les plus fragiles, selon les premières informations révélées par le pédiatre de 71 ans.
Conformément aux recommandations de la Haute Autorité de Santé, la campagne vaccinale ciblera en priorité les résidents en Ehpad ainsi que le personnel susceptible de développer une forme grave de la maladie. Elle sera ensuite étendue en février aux personnes fragiles en raison de leur âge ou de pathologies. Cette étape devrait concerner 14 millions de français. Ce n’est qu’au printemps 2021, que la France entrera dans la troisième et dernière phase de vaccination, élargissant cette fois la campagne de vaccination au reste de la population. Le vaccin sera par ailleurs gratuit pour tous et non obligatoire.  

La stratégie est-elle bonne ? "Prioriser les personnes âgées qui sont les plus vulnérables face au virus, est une bonne stratégie", répond Antoine Flahault, épidémiologiste et directeur de l'Institut de santé globale à la faculté de médecine de l'université de Genève, dans un entretien accordé à France 24. Néanmoins, cette stratégie suscite quelques objections au sein de la communauté scientifique."

Des réserves sur la méthode 

Les réticences portent d’abord sur la question de l'immunosénescence, c’est-à-dire, le vieillissement du système immunitaire. "Les personnes âgées ont un système immunitaire moins performant donc le vaccin peut s’avérer moins efficace sur ces populations". L’autre réserve concerne la sécurité sanitaire. "Il va être plus compliqué d’attribuer la cause de maladies survenues après l’injection du vaccin chez ces populations vulnérables qui présentent déjà - ou sont susceptibles de présenter - davantage de pathologies. On risque donc de rendre, à tort, le vaccin responsable de pathologies." Mais dans les deux cas, ces arguments sont “spécieux", juge l’épidémiologiste. "Sans vaccin, les personnes âgées qui sont les plus durement touchées, risquent de mourir. Or les vaccins ont à ce stade montré leur efficacité. Ce ne sont donc pas des raisons suffisantes pour les en priver. "C’est aussi l’avis de Pauline Londeix, cofondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament. Cependant, elle déplore le manque de stratégie en amont, non seulement de la France mais de l’ensemble des gouvernements. "Tous les États ont financé les laboratoires à coups de millions sans demander de conditions en retour. Tous les établissements de recherche se sont lancés dans une course effrénée, allant tous dans le même sens. C’est dommage parce qu’on aurait pu diversifier les approches en fonction des populations et avoir des vaccins différents", estime la chercheuse. Certains vaccins s’avèrent en effet plus efficaces pour limiter les transmissions, une formule appropriée aux personnes amenées à multiplier les contacts comme les médecins ou les professeurs. D’autres vaccins se montrent, eux, plus efficaces pour limiter les complications. Ces derniers sont davantage recommandés aux personnes âgées et aux patients vulnérables. "Or, tous les vaccins actuellement disponibles sont plus ou moins similaires. Tous portent sur la limitation des risques du Covid-19."  

La distribution en question 

Autre problème soulevé par la responsable de l’Observatoire, le manque de concertation des acteurs de la société civile. "Le gouvernement n’a recueilli que les conseils de médecins et industriels pour définir les espaces de vaccination. Or il aurait fallu que de nombreuses personnes de la société civile prennent part à cette réflexion comme des élus, des responsables associatifs, des sociologues pour cibler le public le plus large possible et offrir un mode de distribution diversifié," estime Pauline Londeix. Ainsi, des patients atteints de pathologies chroniques pourraient recevoir le vaccin à l’issue de leur consultation habituelle, quand des populations plus marginalisées pourraient se rapprocher de structures associatives. 

Concrètement, le mode de distribution des vaccins "dépendra surtout de la façon dont la France va être livrée", explique Antoine Flahault. Au Royaume-Uni, les premières livraisons ont été effectuées par 1000 vaccins. Les vaccinations ne peuvent donc se faire que dans des centres spécialisés car une fois que les vaccins sont décongelés, ils ne peuvent se conserver que dans un temps limité. D'autres vaccins nécessitent, eux, une conservation à - 70°C. Ces derniers ne pourront là encore n’être distribués que dans des centres spécifiques. Enfin, si les vaccins sont livrés en unidose, ils pourront alors se faire chez les généralistes et pharmaciens. "Le meilleur mode de distribution car il se fait en confiance avec son médecin traitant."  

"Ne pas braquer ceux qui n'en veulent pas"

Reste des zones d’ombre. Les scientifiques ne connaissent pas la durée de l’efficacité du vaccin. À ce jour, nul ne sait si la vaccination permettra de stopper la circulation du virus. "Le gouvernement présente le vaccin comme une solution miracle mais si la transmission continue, il faudra peut-être toujours vivre avec", souligne Pauline Londeix. "L’essentiel est surtout de protéger les plus fragiles, nuance Antoine Flahault. Le virus circulera peut-être toujours, mais si la maladie reste bénigne, il n’y a pas non plus de raison de s’en inquiéter."  

Quant aux plus réfractaires vis-à-vis de la vaccination, il ne s’agit pas de l’imposer à l’ensemble de la population, juge Antoine Flahault. "Il ne faut pas braquer ceux qui n’en veulent pas. Les personnes vulnérables de certains pays pauvres sont très heureuses de pouvoir en bénéficier, car il n’y a actuellement pas de vaccin pour l’ensemble de l’humanité." 


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