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« Foot et évasion fiscale, les deux sports nationaux en Argentine »

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Le président argentin, Mauricio Macri

Le président Mauricio Macri, élu en novembre sur un programme anticorruption, est cité dans les Panama Papers. Comme des dizaines de figures de la politique, des affaires... et Lionel Messi.

Cette fois, il n’y a pas eu de grande marche en Argentine. Pas de rassemblement spontané autour de l’obélisque, sur l’avenue du 9-juillet à Buenos Aires, pas de banderoles à la barbe du palais présidentiel, aucun bruit de casserole qui résonne le long des larges avenues de la capitale. Lassés, vidés, KO debout, les Argentins n’ont pas réagi à l’apparition de leur nouveau président, Mauricio Macri, chantre autoproclamé de la lutte anticorruption, en tête de liste des Panama Papers. Son nom ainsi que celui de son père, le milliardaire italien Franco Macri, figurent en effet dans les registres de deux sociétés, domiciliées à Panama et aux Bahamas, qui n’apparaissent nulle part sur ses déclarations d’impôts.

Selon le président, tout cela est «légal», «il n’y a rien de bizarre dans cette opération». Dans un communiqué puis lors d’une interview télévisée, Mauricio Macri s’est expliqué, arguant que, s’il avait bien été enregistré comme vice-président de la première société, il ne possédait aucune participation au capital et n’en avait jamais touché aucun dividende. Il n’aurait donc pas été tenu de le déclarer. Son père, qui figure comme président de ladite société offshore, l’aurait, lui, dûment enregistrée auprès du fisc argentin.

Chevalier blanc

Reste que pour celui qui souhaitait tenir à l’écart la trouble aura de sa puissante famille et s’était peaufiné une image de chevalier blanc de la transparence, pourfendeur de la corruption, le coup est rude. «Personne n’utilise une société offshore à des fins positives. En quarante ans de carrière, je n’ai jamais vu de société de ce type qui fonctionne normalement ou qui paie tous ses impôts», assène l’ancien directeur de l’Inspection générale de la justice, Ricardo Nissen. Il résume ainsi le sentiment de beaucoup d’Argentins désabusés de prendre une fois de plus sur le fait leurs dirigeants en train de grenouiller dans de troubles combines.

L’affaire des Panama Papers éclate à un moment où la justice argentine se saisit de plusieurs cas de corruption impliquant des piliers de la précédente administration. Quelques heures avant ces révélations, l’ancien ministre des Transports Ricardo Jaime a été placé en détention. Il est accusé d’avoir touché des pots-de-vin sur l’achat à prix d’or de trains d’occasion venant d’Espagne, dans un état si pitoyable qu’ils n’ont jamais pu être mis en service. L’ancien ministre de la Planification Julio de Vido est également dans le collimateur de la justice et l’ancienne présidente, Cristina Kirchner, est convoquée par un juge la semaine prochaine, pour une présumée vente spéculative de devises de la Banque centrale suite à un contrôle des changes qu’elle-même avait établi. Dans la nuit de mardi à mercredi, c’est l’homme d’affaires Lázaro Báez qui a été emprisonné : la justice enquête sur des détournements de fonds vers des comptes en Suisse pendant les années de présidence du couple Nestor et Cristina Kirchner (2003-2015), dont il est un ami et grâce à qui il aurait bénéficié de nombreux marchés publics ou de privilèges de la part de l’Etat.

«Deal brisé»

Le mot de corruption était donc déjà sur toutes les lèvres argentines, suivi d’un autre, celui de rigueur. Le nouveau président avait prévenu : pour redresser un pays à l’économie exsangue, il allait falloir se serrer la ceinture. Les subventions aux services publics tels que l’électricité, le gaz, l’eau et les transports en commun, que ne pouvaient plus financer les caisses vides de l’Etat, ont été supprimées. Amputant d’autant le pouvoir d’achat. «Le deal a été brisé, une fois de plus, regrette Facundo Giordano, un entrepreneur de 43 ans qui s’étonne d’y avoir cru. Du sang et des larmes, tendre vers un futur commun et meilleur, pourquoi pas. Mais alors, il faut que tout le monde soit dans le même bateau. Et on a encore une fois la preuve que ce n’est pas le cas.»

Dans un pays qui a souffert toutes les crises et dont les espoirs en de meilleurs gouvernants ont été mille fois brisés, comment continuer à y croire ? Mauricio Macri n’est pas le seul Argentin aux prises avec les Panama Papers, près de 600 de ses compatriotes l’y accompagnent, dont Lionel Messi, le meilleur footballeur du monde. «Après le foot, l’évasion fiscale est le deuxième sport national», ironise une blague populaire. Peut-être est-ce l’autre explication de l’actuelle apathie argentine.

Mathilde Guillaume Correspondante à Buenos Aires

 

 



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