Proposition de révision du Code électoral : Mamadou Diop Decroix veut le second tour aux Législatives et aux Locales

Le député Mamadou Diop Decroix a soumis une proposition de loi à l'Assemblée nationale, informe Le Quotidien. Une proposition qui vise à remplacer l'actuel Code électoral par un autre, notamment dans ses dispositions qui concernent exclusivement les élections locales et législatives.

De l'exposé des motifs, on apprend que l'ancien ministre du Commerce a l'intention de systématiser la tenue d'un second tour lorsqu'une liste ou un candidat, même étant en tête des résultats, n'a pas la majorité absolue. Comme on fait... en France ! « Aujourd'hui, les dispositions actuelles du Code électoral permettent à une liste, n'ayant pas obtenu la majorité absolue, de remporter néanmoins la majorité des sièges en compétition dans une élection locale », écrit Mamadou Diop Decroix. Le parlementaire invite ainsi à une modification de l'article L 146 et propose ainsi qu'on ne puisse plus remporter la liste majoritaire des conseillers ruraux, régionaux et municipaux qu'en cas de majorité absolue. Mamadou Diop Decroix a, par ailleurs, cité le cas du département de Dakar où, lors des législatives précédentes, la coalition Benno Bokk Yakaar a raflé les sept (7) sièges en compétition avec seulement 30 % des suffrages exprimés.

Voici l'integralité du communiqué

Proposition de loi  modifiant la loi n°2012-01 abrogeant et remplaçant la loi n°92-16 du 07 février 1992 relative au code électoral.
             

Soumise par Mamadou Diop député non inscrit.


Exposé des motifs

 

Monsieur le Président de l'Assemblée nationale,

La présente proposition de loi vise essentiellement à hisser notre loi électorale au niveau actuel de notre culture démocratique hautement apprécié de par le monde.
Elle porte notamment sur :

1 - le mode de scrutin aux élections régionales, municipales, rurales et législatives.
2 - la répartition des quotas entre la liste nationale proportionnelle et les listes au scrutin majoritaire départemental,  

3 - la liste gagnante en cas d'égalité des suffrages entre deux listes arrivées en tête.

Aujourd'hui, les dispositions actuelles du code électoral permettent à une liste n'ayant pas obtenu la majorité absolue, de remporter néanmoins la majorité des sièges en compétition dans une élection locale et la totalité des sièges dans une élection législative. Prenons exemple sur le département de Dakar qui est aussi une Ville au sens du code électoral.

Aux élections législatives, avec 30% des suffrages exprimés, une liste arrivée en tête remporte les 7 sièges de députés du département de Dakar laissant les 70% de suffrages sans député.

S'il s'agit des élections municipales, considérons une commune d'arrondissement avec 66 conseillers et 12000 suffrages valablement exprimés. Avec 30%, la liste gagnante  s'adjuge d’emblée la totalité des 33 sièges de la liste majoritaire et 10 sièges de la liste proportionnelle selon le quotient électoral soit 33 + 10 = 43 sièges sur 60 et 72% de l’effectif du conseil municipal. Les 70% de suffrages exprimés n’envoient, in fine, que 17 conseillers à l’institution municipale soit 28% de l’effectif.

Ce mode de scrutin est donc manifestement inique et, à la limite, non conforme à nos traditions démocratiques.

Il s'y ajoute que les dispositions qui prévalent dans ce type de scrutin ne respectent pas le parallélisme des formes avec celles qui président au scrutin présidentiel  qui lui, est à deux tours. D'ailleurs, en amont de l'élection de 2012, lorsque le débat a porté, en un moment donné, sur l'idée de supprimer le deuxième tour de cette élection présidentielle, une extraordinaire levée de boucliers s'en est suivie, à juste titre, pour montrer le caractère antidémocratique d'un scrutin présidentiel qui permettrait à un candidat n'ayant obtenu que 30% des suffrages d'être quand même élu contre l'avis de 70% des électeurs qui se sont rendus aux urnes.

 
Il convient en conséquence de rétablir le parallélisme des formes en la matière en introduisant le scrutin majoritaire à deux tours dans les élections  régionales, municipales, rurales et législatives.

Dans le même ordre d'idées, la répartition des quotas de députés entre la liste nationale proportionnelle et les listes départementales nous semble devoir être modifiée dans l'optique d'être en conformité avec le souci d'équité et de justice qui fonde la présente proposition de loi. Vous conviendrez avec moi en effet qu'un scrutin majoritaire départemental à un tour avec un quota de 60% de députés à élire dans ces conditions constitue un facteur de déséquilibre injustifié dans le rapport des forces au parlement.

Comme indiqué plus haut, la qualité de notre système démocratique ne devrait plus pouvoir cohabiter avec des vestiges qui relèvent de l'époque où  nous cherchions encore notre voie dans une Afrique rongée par le monolithisme et l'autocratie.

Concernant la jeunesse, le présent texte propose la modification du dernier alinéa de l'article L.147 qui prévoit, en cas d'égalité des suffrages, de donner la victoire à la liste la plus âgée (celle dont la moyenne d'âge des candidats est plus élevée). Il nous est en effet apparu que la loi électorale devrait aussi tenir en considération le rôle essentiel de la jeunesse dans les élections  d'aujourd'hui et leurs responsabilités historiques dans le développement du pays dans un contexte mondial et national nouveau à tous égards. Le code de 1992 avait déjà opéré des avancées significatives en abaissant l'âge électoral de 21 à 18 ans si bien qu'aujourd'hui plus de 50% des électeurs inscrits sur le fichier électoral sont des jeunes de moins de 35 ans. Il nous semble  par conséquent plus cohérent et finalement plus équitable et plus juste d'inverser cette disposition en légiférant en faveur de la liste la plus jeune en cas d'égalité des suffrages.

Tel est, Monsieur le Président de l'Assemblée nationale, l'exposé des motifs à la base de la présente proposition de loi que je souhaite soumettre à notre auguste assemblée.


L146
formulation actuelle : " Les députés à l'Assemblée nationale sont élus à raison de  quatre vingt dix (90) députés au scrutin majoritaire à un tour dans le ressort du département et de soixante (60) députés au scrutin proportionnel sur une liste nationale"...

Formulation proposée : " Les députés à l'Assemblée nationale sont élus pour moitié  au scrutin majoritaire à deux tours dans le ressort du département et pour moitié au scrutin proportionnel sur une liste nationale"...

"Au premier tour du scrutin, il n'est utilisé qu'un seul bulletin de vote pour les deux modes de scrutin".

L.147 actuel

3ème alinéa : sont élus les candidats de la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages valablement exprimés. Si le département ne comporte qu'un seul siège, le candidat ayant le plus grand nombre de suffrages valablement exprimés est élu.

 Modifications proposées

L.147 3ème alinéa : sont élus au premier tour de scrutin les candidats de la liste qui a obtenu la majorité absolue des suffrages valablement exprimés. Si le département ne comporte qu'un seul siège, le candidat ayant obtenu la majorité absolue des suffrages valablement exprimés est élu dès le premier tour.

Si aucune liste n'obtient la majorité absolue au premier tour dans le département, alors un second tour est organisé dans les quinze jours qui suivent.

 Dernier alinéa

Formulation actuelle : " En cas d'égalité de suffrages dans le département, la liste de candidats dont la moyenne d'âge est la plus élevée (titulaires et suppléants) remporte les sièges".
Formulation proposée : " En cas d'égalité de suffrages dans le département, la liste de candidats dont la moyenne d'âge est la moins élevée (titulaires et suppléants) remporte les sièges".
Conseillers régionaux

L.228
formulation actuelle : " Les conseillers régionaux sont élus pour la moitié au scrutin de liste départementale majoritaire à un tour et pour l'autre moitié au scrutin proportionnel régional sur des listes complètes, sans panachage ni vote préférentiel"...

Formulation proposée : " Les conseillers régionaux sont élus pour la moitié au scrutin de liste départementale majoritaire à deux tours et pour l'autre moitié au scrutin proportionnel régional sur des listes complètes, sans panachage ni vote préférentiel"...

"Au premier tour de scrutin, il n'est utilisé qu'un seul bulletin de vote pour les deux modes de scrutin".
Les conseillers municipaux : L.263

Formulation actuelle : " Les conseillers municipaux sont élus pour moitié au scrutin de liste majoritaire à un tour, sans panachage ni vote préférentiel et sur liste complète et pour l'autre moitié au scrutin proportionnel avec application du quotient municipal...

Formulation proposée : " Les conseillers municipaux sont élus pour moitié au scrutin de liste majoritaire à deux tours, sans panachage ni vote préférentiel et sur liste complète et pour l'autre moitié au scrutin proportionnel avec application du quotient municipal...

"Au premier tour de scrutin, il n'est utilisé qu'un seul bulletin de vote pour les deux modes de scrutin".

Les conseillers ruraux : L.294

formulation actuelle : " Les conseillers ruraux sont élus pour moitié au scrutin de liste majoritaire à un tour, sans panachage ni vote préférentiel et sur liste complète et pour l'autre moitié au scrutin proportionnel avec application du quotient rural...
formulation proposée : " Les conseillers ruraux sont élus pour moitié au scrutin de liste majoritaire à deux tours, sans panachage ni vote préférentiel et sur liste complète et pour l'autre moitié au scrutin proportionnel avec application du quotient rural...

"Au premier tour de scrutin, il n'est utilisé qu'un seul bulletin de vote pour les deux modes de scrutin".