Bisbilles entre musiciens sénégalais: Le ver est dans les cœurs !

C’est dans le rythme de la musique sénégalaise puisque presque toutes les générations ont dansé sur le même tempo. Celui de la jalousie, de la médisance et autres calomnies. De tous les temps, ça a été « je t’aime, moi non plus » ou « ôte-toi de là que je m’y mette ». Dans un secteur où tout le monde aspire à la reconnaissance et à se faire une place au soleil, tous les coups sont permis et même les plus mortels.

« Cela a toujours été ainsi », résume, un air blasé, un vieux croulant qui a usé ses semelles dans toutes les boites de nuit de la capitale et des régions de l’intérieur du pays avant de prendre sa retraite à … 70 ans. Il a vu et assisté à la guerre froide entre le Star Band d’Ibra Kassé et le Number One et, plus tard, entre ce dernier orchestre et le Baobab puis entre le Super Diamono et le Lemzo Diamono etc. Youssou Ndour a été victime de la même hostilité quand il s’est éloigné de l’aile protectrice d’Ibra Kassé pour fonder sa formation l’Etoile de Dakar qui s’est muée, plus tard, en Super Etoile. Les anciens de ce groupe se sont donné de vilains coups, juste pour être au pinacle.

Les chanteurs El Hadji Faye tout comme Pape Djiby Bâ et autres ont constamment souffert de l’éclosion de Youssou Ndour à leur détriment. La rivalité entre le même Youssou Ndour, Thione Seck et le Super Diamono a été particulièrement dure et tous les coups étaient permis pour ravir la vedette aux autres. Et ce quoi que puissent dire ces ténors qui ont souvent tendance à nier cet antagonisme. « C’est juste pour faire dans la diplomatie, ils ne se sentent pas et ne s’aiment pas », renseigne notre vieux croulant. L’on se rappelle ainsi du fameux projet « Eleuk Ci bir » entre You et Pène qui a suscité toutes sortes de susceptibilités. Bien que le projet ait vu le jour, ça s’est arrêté là, les tournées de promotion prévues n’ayant jamais eu lieu.

Quand les divas se crêpent les chignons

Plus féroce encore est la compétition chez les femmes qui ne se gênent pas pour se crêper publiquement les chignons. L’opposition entre Viviane Chédid et Aby Ndour, puis Coumba Gawlo Seck ou Titi, n’est pas un simple vue de l’esprit, elle est bien réelle. C’est ce que Coumba Gawlo Seck nomme les coups bas reçus tout au long de sa carrière de la part d’un puissant musicien qu’elle n’a jamais nommé. Point n’est besoin d’un dessin, cependant, pour savoir celui qui lui menait la guerre et qui ne voulait pas qu’elle explose. Leur relation est toujours en dents de scie et ils n’ont presque jamais partagé une même scène.

Les nouvelles stars de la musique vivent les mêmes problèmes, même si elles prétendent le contraire. Malgré tout le bien que Pape Diouf dit de Waly Seck, les observateurs ne sont pas dupes, la concurrence est bien coriace entre ces deux valeurs montantes de la musique sénégalaise qui se marquent à la culotte. Aucun des deux ne veut laisser une parcelle de terrain à l’autre. Tout cela est de bonne guerre, se dira-t-on finalement. C’est également ce qui fait le charme de la musique sénégalaise où tous les coups sont autorisés.

Et ce même si tous les musiciens, pas du tout naïfs, pensent le contraire de ce qu’ils disent publiquement tout en assurant leurs arrières et en ne baissant pas la garde pour ne pas prendre les coups de l’ennemi. Un ennemi hypocrite qui clame partout qu’il est un complice. Un jeu de dupes, on vous dit !