La pratique de la Planification familiale (Pf) fait l’objet d’une houleuse polémique au Sénégal surtout au sein de la religion musulmane. En effet, si certains imams sont d’avis que cette pratique est autorisée par l’islam dans certaines conditions d’autres rejettent catégoriquement cette théorie et parlent de thèse sans fondement. L’église, quant à elle, rejette aussi tout usage d’artifice en vue de promouvoir une Pf.
L’espacement des naissances, la lutte contre la mortalité maternelle et infantile, la recherche d’un équilibre et d’un bien-être social, sont entre autres, autant de raisons évoquées par les souteneurs de la Planification familiale (Pf) pour encourager cette pratique. Au Sénégal, pays où l’on estime la population musulmane à près de 95%, les religieux peinent à trouver un consensus sur le caractère licite ou non de la Pf. Imam Ousmane Samb, Coordonateur du Réseau islam et population (Rip) et ses collaborateurs ont, dans leur théorie, légitimé la pratique de la Pf avec des arguments à l’appui. Arguments battus en brèche par d’autres à l’image de Oustaz Alioune Sall et de l’imam Dame Ndiaye. Même l’église catholique n’a pas été en reste. Elle estime qu’il est formellement interdit d’utiliser un quelconque artifice pour planifier des naissances.
Pour lutter contre la mortalité maternelle et infantile, l’espacement des naissances reste, pour plus d’un, le moyen le plus efficace. Seulement, cette question fait partie des sujets qui soulèvent beaucoup de malentendus et de controverses sur le plan religieux, suscitant ainsi la méfiance de nombreuses familles. Pour que la Pf soit acceptée et appliquée par la population, de nombreuses rencontres et conférences sont organisées afin de lever le coin de voile sur cette pratique.
IMAM OUSMANE SAMB, COORDONNATEUR DU RESEAU ISLAM ET POPULATION : «La planification familiale est autorisée à condition que…»
La problématique de l’autorisation de la Planification familiale (Pf) risque de diviser les imams. Contrairement à certains prêcheurs qui plaident pour l’interdiction formelle de cette pratique, imam Ousmane Samb, est, quant à lui, d’avis que la religion musulmane ne refuse pas cette méthode d’espacement des naissances. Coordonnateur du Réseau islam et population (Rip), imam Samb a estimé que «si on se base sur les écrits du Saint Coran, à la Sunna, au consensus des Oulémas et du raisonnement par analogie, l’espacement des naissances est autorisé par l’islam depuis son avènement, contrairement à ce que pense une certaine couche de la population sénégalaise», dit-il.
A ceux qui sont contre cette pratique et qui l’assimilent à une façon de tuer les enfants», imam Samb rétorque, à l'occasion d’un atelier initié récemment sur ce thème, qu’«on ne peut pas tuer quelqu’un qui ne vit pas encore. Ici, on parle de produit ou de moyen pour empêcher la rencontre de deux éléments afin d’éviter une fécondation», précise-t-il.
Dans un document intitulé «Argumentaire islamique sur l’espacement des naissances», le Rip et ses alliés ont plaidé en faveur de cette pratique. «L’islam autorise tout ce qui peut contribuer à l’épanouissement de l’être humain sauf s’il existe un texte l’interdisant explicitement : «Allah veut pour vous la facilité, il ne veut pas la difficulté pour vous…» (Sourate 2, verset 185) citent-ils en référence. Ils ont, ainsi, énuméré de nombreuses raisons pouvant pousser à la pratique de l’espacement des naissances. Des raisons qui peuvent, selon eux, être d’ordre : Sanitaire (la crainte de tomber enceinte pendant l’allaitement, la crainte pour la santé de la mère ou du bébé entre autres) ; social (la crainte des parents de ne pouvoir protéger leur progéniture, le désir de sauvegarder la beauté de la femme, la recherche d’un équilibre et d’un bien-être social). Mais aussi d’ordre économique, (quand les parents ne disposent pas de moyens suffisants pour élever et entretenir beaucoup d’enfants (…).
«On ne peut pas tuer quelqu’un qui ne vit pas encore»
Pour les souteneurs de la Planification familiale, cette pratique n’est pas un phénomène nouveau, puisqu’elle était, selon le Rip et Cie, pratiquée à l’époque du Prophète (Psl) et des califes orthodoxes, sous la forme de coït interrompu ou abstinence volontaire, au moment où les autres religions l’interdisaient ou la considéraient comme une infanticide mineur. Car, c’est un droit qui appartient au couple et aucune personne physique ou morale n’a le droit de les y contraindre. Dans ce document élaboré en décembre 2011, il est souligné que «la Pf ne consiste pas à la limitation des naissances, mais plutôt à une organisation choisie par un couple pour planifier leur procréation».
«Le désir de sauvegarder la beauté de la femme, une raison pouvant pousser à la Pf»
Quant à la limitation des naissances, souligne le document, elle consiste à fixer le nombre maximum d’enfants que le couple souhaite avoir. Ainsi, le couple prend la décision privée de limiter leur procréation. Ce qui n’est uniquement permis que lorsqu’elle est basée sur des raisons médicales approuvées par un médecin spécialiste.
Par contre, la planification est interdite par l’islam, dès lors que c’est une volonté du gouvernement plutôt que celle du couple, renseignent l’imam Samb et Cie. Pour lui, «ceux qui disent que la Planification familiale n’est pas autorisée ont leur argument. En tout cas, la Sunna l’autorise. Et c’est ce que le prophète a dit, a fait ou a fait faire. C’est également tout ce qu’il a entendu dire sans réagir ou ce qu’il a vu faire sans intervenir négativement», disent-ils.
OUSTAZ ALIOUNE SALL : «Il faut que les porteurs de voix soient honnêtes dans leurs communications»
Homme religieux, connu pour ses prêches, Oustaz Alioune Sall, est de ceux qui sont d’avis que «l’islam n’autorise pas la Planification familiale». Dans un entretien qu’il nous a accordé, il confie : «Avoir un enfant n’a été et ne sera jamais synonyme de maladie, quel que soit le nombre». Pour lui, il est inutile de «planifier pour espacer les naissances». Il assimile cela à «une perte de temps, car c’est Dieu qui programme tout. Lui Seul est habilité à le faire et nul ne pourra Le remplacer». La période de fécondité est bien déterminée chez la femme, avance Oustaz Alioune Sall qui estime que «Dieu en est conscient, Lui Seul est capable de donner à qui Il veut, le nombre d’enfants qu’Il veut et quand Il veut. Si c’est par souci économique, par peur de naissances rapprochées ou pour être en bonne santé entre autres, c’est une grave erreur. Cela incombe de la Volonté du Tout Puissant», tranche-t-il.
En plus, poursuit-il, «ce phénomène n’est pas dans nos traditions, c’est un fait que certains veulent calquer sur d’autres cultures qui ne sont pas les nôtres. C’est pour s’enrichir que de soi-disant éducateurs créent toutes sortes de rencontres pour tromper la population avec une multitude de noms tels que : «Santé de la reproduction» ;
«espacement des naissances» ; «limitation des naissances» entre autres.
La conséquence de toutes ces pratiques est que, selon Oustaz Sall, toutes les adeptes de ces politiques sont maladives, pour la simple raison que les produits qu’elles utilisent renferment des éléments aux effets secondaires multiples. «C’est seulement vers les années 90 que les femmes ont commencé à avoir certains problèmes de santé. Et la cause se trouve dans la planification familiale, car auparavant les femmes n’avaient jamais eu cette préoccupation», dit-il.
Du nombre de ceux qui sont réfractaires à cette pratique, promoteur du natalisme, il trouve qu’«il faut que les porteurs de voix soient honnêtes dans leurs communications. Il faut que ces derniers rapportent fidèlement les écrits du Saint Coran, car l’islam n’autorise et n’a jamais autorisé la Planification familiale. S’ils ne peuvent pas se conformer aux textes du Saint Coran, je leur conseille de garder le silence. C’est mieux que d’avancer des thèses qui ne tiennent pas la route, juste pour leurs propres intérêts», conclut-il.
«La planification n’est rien d’autre que la limitation des naissances», précise imam Dame Ndiaye
La conviction de Oustaz Sall, imam Dame Ndiaye la partage. Selon lui, «si planifier, c’est espacer des naissances, cette pratique n’est pas autorisée par l’islam. C’est le Prophète (Psl), lui-même qui l’a dit». Cela est, selon lui, prouvé dans l’un des plus grands livres de Hadith de Sahib Muslimun. «Ils disent que, c’est l’espacement des naissances, que c’est la santé de la reproduction, alors que c’est la limitation des naissances. Leur seule motivation reste le profit et pas l’intérêt général», renseigne imam Ndiaye qui précise que «ceux qui avancent que cette pratique est autorisée sont seulement motivés par leurs propres intérêts. Ils cherchent le profit. Car, ils parlent de rapprochement des naissances alors que ce n’est pas le but recherché. Ces gens ne sont pas animés par la bonne foi. La preuve, je les ai tous invités et ils n’ont pas répondu à notre invitation. J’ai fait 10 communiqués juste pour qu’ensemble on échange sur cette confusion mais, puisqu’ils n’ont pas assez de preuves, ils ne se sont pas présentés», déplore-t-il.
Parlant au nom de l’église catholique, Abbé André Latir Ndiaye estime, pour sa part, que «la planification familiale n’est autorisée que si c’est naturel et dans le mariage. L’utilisation des moyens contraceptifs artificiels est interdite». Selon lui, cette pratique qui favorise avec la prise de certains médicaments peut, entre autres, encourager l’infidélité chez la femme.
14 Commentaires
Tiédo Fall
En Septembre, 2013 (15:54 PM)Tangaay
En Septembre, 2013 (15:55 PM)Sarko
En Septembre, 2013 (16:08 PM)Quand la misère entraine d'autres misères,c'est dieu qui l'aura voulu également.
On n'est vraiment pas sorti de l'auberge.Continuez,vous êtes sur la bonne voie !!!
Dieu
En Septembre, 2013 (16:49 PM)Le Fil D'ariane
En Septembre, 2013 (18:19 PM)Boy Melax Ignorant
En Septembre, 2013 (19:31 PM)Hoodere
En Septembre, 2013 (05:44 AM)Je sais que dans le foutah la femme repartait durant quelques mois chez ses parents apres l'accouchement pour eviter une nouvelle grossesse precoce.
C'etait une forme de planification
Janus
En Septembre, 2013 (07:07 AM)Jeune Fille
En Septembre, 2013 (11:22 AM)Selon lui djiguene boul diang ak bouy ligueye bamoul niarign, j'etais choquée! Dans notre famille , sont les femmes tres pieuses d'ailleurs qui ont reussi et qui assurent presque toutes les depenses et finances les etudes des aures freres et soeurs sans oublier celles de leur propre famille.
Il doit actualiser un peu son savoir et ses connaissances, le monde bouge.
Ngéne balma akh
Khady66000
En Septembre, 2013 (12:05 PM)Ceci dit, je ne comprends pas pourquoi nos imams n'arrivent à actualiser les textes coraniques. En tant que musulmane, je suis pour la planification et pour l'avortement et je n'ai pas le sentiment d'être en désaccord avec l'islam.
Dans les thème sociétaux majeurs, on a en filigrane, des hommes qui veulent maintenir leur domination sur les femmes.
Oustaz Alioune SALL, que je respecte par ailleurs, se trompe quand il dit que la planification ne fait pas partie de nos us et coutumes. La planification sous une forme médicalisée oui, mais il est établie qu'en Afrique, il existe des mécanismes de planification naturelle. Tels que le retrait de l'homme avant l'éjaculation, l'abstinence sexuelle pendant les périodes d'ovulation de la femme, la douche vaginale post-coit, ainsi que l'allaitement naturelle et exclusif.
Le fond du débat, est que la planification familiale est libératrice pour la femme et en bon sénégalais, cela leur est insupportable.
Distribuez
En Septembre, 2013 (12:38 PM)Ces Egoistes
En Septembre, 2013 (23:03 PM)Réfléchi
En Septembre, 2013 (13:41 PM)vous aussi réfléchissez aussi ce n'est pas pour rien que la femme arréte d'enfanter a la ménaupose.quant a Alioune Sall réfléchi un peu
Refléchir
En Septembre, 2013 (15:35 PM)Participer à la Discussion