L'année scolaire tire à sa fin. Et les examens se pointent à l'horizon. Aujourd'hui, les candidats au Baccalauréat planchent sur le premier sujet : les épreuves anticipées de philosophie. Sur le qui-vive, certains potaches, soucieux de multiplier leurs chances de réussite, ont parfois recours aux pratiques mystiques pour espérer décrocher les fameux sésames, Bfem ou Bac.
Tous n'ont d'yeux que pour lui. Assis en tailleur au centre de la cour, formulant des incantations à voix basse, Lamine Sall* enfouit un arsenal hétéroclite dans un trou préalablement creusé par ses soins. Le brouhaha et la cacophonie ne semblent pas le déranger. Le garçon au physique ramassé, court sur pattes, léger embonpoint, point de mire des autres potaches agglutinés dans la cour, semble de marbre. Son rituel achevé, il se lève imperturbable, avant de se diriger vers la salle de classe où il doit composer pour l'examen du Baccalauréat, ignorant les mains tendues de ses autres camarades qui lui passaient le bonjour. Devant un tel mépris, Jacob Diatta, son camarade de classe, râle sec. «Comment ose-t-il se comporter de la sorte aujourd'hui ? On partageait la même table en classe et aujourd'hui, il refuse de me serrer la main ! C'est à ne rien y comprendre. Est-ce qu'un diplôme vaut cela ?», peste-t-il. La scène racontée par Jacob Diatta, se déroule dans un lycée de Ziguinchor (ville située au sud du Sénégal à 454 km de Dakar, Ndlr), au premier jour des examens du Baccalauréat. Et dans la cour, les élèves planchent à volonté sur le sujet du jour : l'étrange comportement de leur camarade, Lamine Sall, la superstition de façon générale et les pratiques mystiques qui entourent d'habitude les examens au Sénégal. Entre psychose, méfiance, croyances et paranoïa, le cocktail est souvent savoureux. Et surtout riche en anecdotes.
«C'est incroyable, comment les gens peuvent-ils être si superstitieux et adopter des attitudes bizarres le jour de l'examen ?», ironise Youssoupha Diakhaté, 23 ans, élève en Terminale S2B au lycée Maurice Delafosse de Dakar. A quelques centimètres de lui, Mohamed Samb, son camarade de classe, hoche la tête dans une mimique approbatrice. Teint noir, physique de sahélien, fourré dans un polo blanc à rayures, ce jeune de 23 ans, candidat au Bac, rajoute une couche sur le tableau burlesque des anecdotes à propos des pratiques mystiques qui entourent les examens : «Ce sont des choses que l'on voit souvent le jour de l'examen. J'en vois certains qui frisent le ridicule, en n'adressant même pas la parole à leurs camarades. Je ne les blâme pas car nous sommes en Afrique et ce continent a ses réalités. Mais parfois, c'est à la limite du grotesque», lâche-t-il sentencieux.
En cette fin de matinée au temps incertain, entre chaleur et fraîcheur, la cour de l'établissement du lycée Maurice Delafosse grouille d'activités. Disséminés en bandes sur les bancs épars de la cour du lycée, les candidats au Baccalauréat, sanglés dans des blouses bleues, uniformes du lycée, devisent sur d'hypothétiques sujets pour l'épreuve de philosophie, prévue pour aujourd'hui. Certains groupuscules révisent dans une ambiance studieuse les grandes lignes de leurs cours. Ici, une jeune fille, foulard savamment noué sur la tête, apostrophe à grand renfort de cris une camarade perdue de vue depuis ...ce matin. Là, des garçons munis de banderoles, s'activent dans la préparation d'une manifestation. Au dehors, la circulation bute sur les bouchons. Debout devant le portail du lycée, Sokhna Maï Sougou, 19 ans, roule des yeux et lâche un rire amusé à l'évocation du sujet. «Bien sûr que la méfiance est de mise entre élèves à l'approche et le jour de l'examen. Car, de nos jours, on ne peut avoir confiance en personne, assène la candidate au Bac. Au lycée, on voit n'importe quoi. Par exemple, lorsqu'on a affiché la liste des convocations pour les épreuves physiques, certains élèves ont exfiltré leurs noms et numéros de la liste, en les raturant, déchirant ou y mettant une couche de Blanco (correcteur liquide). » De peur de voir leurs nom et numéro tomber entre des mains «ennemies». De la pure superstition pour ceux qui n'y croient point. Une «précaution utile» pour les «convaincus», qui redoutent de se faire prendre dans la trappe ...mystique.
«Le jour de l'examen, mon oncle s'est retrouvé avec la jambe droite enflée...»
Lycée d'excellence pour jeunes filles, John Fitzgerald Kennedy offre en vue d'ensemble, une foule en pleine activité. On se croirait dans une ruche remplie d'abeilles aux coloris rose et rouge-bordeaux. Ça grouille à l'intérieur. Certaines pressent le pas et se hâtent de regagner les salles de classe pour reprendre les cours de l'après-midi. Assises sur des bancs à l'ombre d'un arbre, Oumou Kalsoum Lô Sow, Salimata Aminata Diop et Ndèye Racky Dione, visages poupins et sourires complices, prennent scrupuleusement des notes. «Le mysticisme lors des examens est une réalité chez nous, s'emballe Salimata Diop. Moi, personnellement, je n'ai pas encore eu à en faire les frais. Mais cela est arrivé à un de mes oncles. Alors qu'il devait passer le Bac, il s'est retrouvé, le jour de l'examen, avec la jambe droite enflée. Elle n'a désenflé qu'après la proclamation des résultats. Ce n'est que l'année d'après qu'il a pu faire l'examen. Cela, après avoir pris les devants et s'être prémuni pour contrer les mauvais sorts. C'est pour cela que moi, je suis très prudente, mais je ne pousse pas la paranoïa jusqu'à refuser de serrer la main de mes amies», lâche-t-elle dans un éclat de rire contagieux. Oumou Kalsoum, sa copine de classe, peu portée sur ces croyances irrationnelles, dit s'en remettre, elle, à la volonté de Dieu. En partie, seulement. «Je ne me prends pas trop la tête. Cela ne veut pas dire que je dis non quand ma mère me donne des amulettes ou des bains mystiques pour me laver avec», susurre-t-elle, un chouia timide.
«Elève moyenne en classe et première du centre
Autre lieu, autre ambiance. Au lycée Blaise Diagne de Dakar, l'heure est à la remise des convocations. Rassemblés devant le provisorat, les élèves récupèrent leur «sésame» pour pouvoir passer les épreuves qui débutent ce matin par les anticipés de philosophie. «Boubacar, viens répondre à ces journalistes», vocifère un de ses camarades qui feint d'être affairé avant de s'éclipser. Brin d'homme au physique rachitique, Boubacar, flottant dans un jean noir et une chemise blanche, piaffe de révéler ses «secrets». «La psychose mystique qui entoure les examens ? Je peux vous en dire un bout», avance-t-il. «On voit beaucoup de bizarreries le jour des examens, enchaîne le volubile. Comme le cas d'un de mes camarades qui s'est pointé le jour des examens avec des brindilles sur toute la tête ou un autre qui s'est présenté en salle avec des bouts de papiers blancs sur les cheveux. Des résidus de mixtures avec lesquelles ils ont accompli leurs libations et bains mystiques. C'était trop marrant. On s'est moqué d'eux pendant toute la journée, même si certains parmi nous refusaient de leur ser¬rer la main de peur qu'ils pompent leur «weurseuk (chance) » ou qu'ils leur portent la poisse», glousse-t-il. Certains poussent le grotesque un peu plus loin, ne se faisant pas un sang d'encre des qu'en-dira-t-on. «Comme cette fille qui a donné en offrande un pagne tissé au président de jury devant tous les élèves, en plein milieu de la cour du lycée.. Elle s'est retrouvée, au grand étonnement de tous, première du centre d'examen, alors qu'en classe, elle peinait à figurer parmi les 20 premiers», narre Jacob Diatta. Pour beaucoup, le but est de réussir, qu'importe la manière.
SOURCE : L’OBS MARIA DOMINICA T. DIÉDHIOU ET NDÈYE FATOU SECK
12 Commentaires
Laminebremen
En Juin, 2011 (05:09 AM)Layla
En Juin, 2011 (05:18 AM)Cheuu
En Juin, 2011 (05:24 AM)Vous Etes Betes ??
En Juin, 2011 (07:31 AM)Undefined
En Juin, 2011 (07:53 AM)dc je pense ka la coalition entre cheikh bamba dieye talla sylla mansour djammil et ibrahima fall
kan pensez vous ??
Tienne
En Juin, 2011 (08:18 AM)Tienne
En Juin, 2011 (08:29 AM)Tienne
En Juin, 2011 (08:42 AM)Tienne
En Juin, 2011 (09:21 AM)Tienne
En Juin, 2011 (10:00 AM)Zepp
En Juin, 2011 (11:24 AM)bon courage à cx qui le passent:-
Khame Lépe
En Juillet, 2011 (17:23 PM)Participer à la Discussion