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Culture

[Reportage] Le nouveau souffle des manufactures de Thiès, fleuron culturel de Senghor

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[Reportage] Le nouveau souffle des manufactures de Thiès, fleuron culturel de Senghor

Après avoir coupé au ciseau les fils de laine, Seydina Oumar Cissé fait tourner le rouleau du métier à tisser : peu à peu, la tapisserie se déroule et l’œuvre prend forme sous ses yeux.


Le tisserand sénégalais de 28 ans contemple pour la première fois le résultat de six mois de travail. Les formes, les couleurs, les motifs... Tout est identique à la création originale de l'artiste sénégalais Cheikh Diouf. "C'est une grande satisfaction", s'émeut-il.


M. Cissé est artisan aux manufactures sénégalaises des arts décoratifs de Thiès, une référence dans la production artistique sur le continent africain. Ses créations ornent les murs d'organisations du monde entier, du siège des Nations unies à New York à celui de l'Union africaine d'Addis-Abeba, ainsi que de nombreux palais de chefs d'Etat.


Ce fleuron de la politique culturelle de l'ancien président et poète Léopold Sédar Senghor (1906-2001) a retrouvé sa vigueur grâce à de nouveaux partenariats, comme avec la maison Chanel, et une diversification de ses activités.


Les manufactures "suscitent un regain d'intérêt, porté localement par des galeries qui ont des statures internationales et un retour d'engouement pour le textile et les tapisseries" sur le marché de l'art, estime Coline Desportes, chargée de recherches à l'Institut national d'histoire de l'art (INHA).

Héritage

A leur création en 1966, six ans après l'indépendance du Sénégal, M. Senghor leur fixait un objectif : "créer un art nouveau pour une nation nouvelle". En Afrique, l'art du tissage faisait des merveilles, dans l'habillement notamment, mais la tapisserie murale était jusqu'alors inconnue dans le pays.


Deux ans plus tôt, quatre artisans étaient partis se former en France, l'ex-puissance coloniale, dans les célèbres manufactures des Gobelins et d'Aubusson, pour acquérir le savoir-faire des liciers.


Cet art nouveau devait être "la symbiose des techniques importées de France et de la culture traditionnelle", disait-il.


L'héritage de M. Senghor a été conservé, non sans mal. Après lui, l’État s'est désengagé, la tapisserie est passée de mode et l'établissement a failli disparaître, avant que les commandes ne repartent à la hausse dans les années 2000.


Ce jour de fin avril, l'ancienne caserne coloniale aux murs blanc et vert, située dans un écrin de verdure au cœur de Thiès, à 70 kilomètres à l'est de Dakar, sert de décor au tournage d'un film historique.


Dans les ateliers, les artisans n'ont pas le droit à l'erreur. Avec minutie, ils suivent le tracé du carton sur leur métier à tisser. La laine vient d'Europe, le coton de Thiès. Chaque œuvre, sélectionnée lors d'un concours, peut être reproduite en huit exemplaires.

Diversification

A quelques encablures, une trentaine de touristes américains écoutent les explications d'Abdou Diouf, chef de l'atelier de cartonnage qui produit la maquette guidant toutes les opérations de tissage.


Le groupe s'attarde autour d'un rideau de "chapelets" multicolores exposé au mur. "Chacun de ces chapelets est constitué des fils de laine qui composent les tapisseries créées ici, avec le nom de l'artiste et de son œuvre. J'ai l'habitude de dire que c'est l'âme même des manufactures, son histoire accrochée", indique Abdou Diouf.


L'accueil de touristes et d'équipes de films témoigne de la diversification des activités de l'établissement public, à caractère industriel et commercial.

Le directeur général, Aloyse Diouf, assure que 14 chambres seront bientôt disponibles pour accueillir des visiteurs, ainsi qu'une résidence d'artistes. "Nous voulons faire des manufactures une locomotive culturelle, un lien entre art et tourisme", dit-il, même si les commandes de l’État demeurent essentielles à son existence.


"La tapisserie n’est pas forcément liée à notre histoire et est restée principalement élitiste, ce sont surtout les autorités qui en achètent pour contribuer au rayonnement artistique du Sénégal", souligne M. Diouf. "L'appropriation de cette forme d'art par les Sénégalais est un travail de longue haleine que nous développons en invitant les écoles à visiter les manufactures".


Désormais, au-delà de leur activité principale, les manufactures créent aussi des tapis de prière, du batik et de la céramique, des produits un peu plus accessibles pour les Sénégalais que la tapisserie murale dont le prix s'élève à 1,5 million de francs CFA le mètre carré, soit environ 2.300 euros.






2 Commentaires

  1. Auteur

    il y a 2 semaines (15:36 PM)
    Superbe article tres interessant !
  2. Auteur

    Macky Sy

    il y a 2 semaines (08:09 AM)
    Woow félicitation Seydina et bonne continuation 
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