Les femmes et les bonnes continuent à vivre une situation dramatique, depuis cette pénurie de gaz qui perdure. Elles font le tour des stations, magasins tous les jours pour finalement repartir bredouilles. Cette navette fait partie de leur quotidien. Elles jouent aux coudes pour obtenir une bouteille.
La station Total du rond-point Liberté 6 est le lieu de convergence des employées domestiques ou des dames qui cherchent du gaz. Assise sur les rebords d’un mur, Mariama Badji affiche une mine triste. Elle est visiblement fatiguée. Depuis trois jours, la bonne dame est sans gaz. Depuis trois jours, elle part de station en station, de magasin en magasin pour se procurer une bouteille de gaz. Depuis trois jours aussi, elle fait la cuisine avec du charbon.
« Nous vivons ces derniers jours un calvaire. Je ne sais pas combien de stations, de magasins j’ai visités. Dès que l’on m’informe qu’il y a du gaz quelque part, je m’y rends dans l’immédiat. C’est ce que je fais depuis trois jours », confie cette habitante de la cité Sipres et elle n’est pas la seule à se livrer à cette gymnastique. Plusieurs dames sont assises sur le pavé, crevées de fatigue. Une partie s’est adossée au mur du magasin pour se mettre à l’abri du soleil qui était au zénith. Les files, pour se procurer le précieux gaz, parcourent le parvis dans tous les sens. Les bouteilles font office de banquette car l’attente est longue. Et il faut surtout s’armer de patience et renoncer à toutes ses activités pendant des jours, pour avoir cette denrée rare. Marie Ngom, assise sur les rebords d’une muraille, les mains apposées sur ses pommelles, attend dans le désespoir. Elle fait depuis trois jours des va-et-vient entre la maison de son patron et cette station, d’où elle repartait bredouille. Elle ne sait pas quand cette navette prendra fin.
« Je suis dans cette station depuis 8 heures. Nous attendons un éventuel camion ; et ce n’est pas sûr qu’il y aura un nouveau stock, donc je fais constamment la navette. Nous autres femmes vivons une situation très pénible durant ces dernières semaines », s’exprime Marie Ngom. Pour obtenir une bouteille, il faut jouer des coudes, batailler ferme. Cela est devenu plus compliqué et certaines dames ou bonnes s’attachent les services de ces adolescents suspendus sur les grilles des garde-fous qui délimitent le parvis de la station. « Les rixes, les bousculades rythment la vie des femmes dès l’arrivée d’un camion. Les gens ne respectent plus la queue, parce qu’ils savent qu’il n’y aura pas de gaz pour tout le monde », renseigne Marie Ngom. Elles se plaignent aussi de la spéculation sur les prix (la grande bouteille s’échange à 2.200 francs Cfa), sans compter les billets de taxis ou de cars rapides. Jusqu’aux environs de 13 heures, les ménagères continuent d’affluer vers cet endroit à l’image de Ndèye Sène, venue du quartier de Niarry Tally. Elle a fait plusieurs endroits avant de parvenir au rond-point Liberté 6. Cette crise du gaz domestique a donné un renouveau au charbon de bois dans plusieurs foyers de Dakar, y compris chez les personnes aisées. « Nous sommes sans gaz depuis un mois. Nous cuisinons avec du charbon de bois », confie Aïda Dieng. Ces propos sont repris par Fatim, domiciliée à Sacré-Cœur 2. La jeune fille, une intellectuelle, du nom de Ouley, vêtue d’un « haut » bleu et d’une jupe, s’en prend aux hommes qui ne font rien pour aider leurs femmes et les bonnes. Pourtant dans cet endroit, on rencontre de temps à autre des pères de famille.
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