Les Américains s'interrogent grandement au sujet de l'avenir économique de leur pays.
Ils sont déboussolés. Personne n'aurait cru que la première puissance mondiale du capitalisme vacille sur ses bases. La valse des centaines de milliards gouvernementaux pour secourir, garantir, voire nationaliser les anciens fleurons de Wall Street déroute nos voisins du sud.
Personne ici ne pensait qu'un jour le contribuable deviendrait « propriétaire » d'entreprises privées réputées solides.
Comme dirait un professeur d'économie, le gouvernement américain nationalise les dettes et privatise les profits.
De l'administration Reagan à aujourd'hui
Certes, on peut voir dans les déboires de Wall Street les résultats de la longue déréglementation amorcée sous Ronald Reagan, entré à la Maison-Blanche en 1981.
Le scandale retentissant des faillites des caisses d'épargne à la fin des années 80 avait ramené certains contrôles gouvernementaux, avec une facture de 400 milliards de dollars.
Mais le mouvement de dérégulation a repris son élan, même sous le démocrate Bill Clinton alors que le Congrès était dirigé par les républicains.
Le phénomène aura atteint son apothéose sous George W. Bush avec la crise actuelle.
Aujourd'hui, pratiquement tous les hommes politiques réclament de nouvelles normes de contrôle, particulièrement pour les produits dérivés du secteur financier.
Le réveil est brutal. L'éclatement de la fabuleuse bulle de l'immobilier criblé par des hypothèques à haut risque, devenues « toxiques », menace le rêve américain.
Certains évoquent à la blague la « République socialiste des États-Unis d'Amérique » ou USSA (United Socialist States of America)!
Mais on rit jaune, la facture est très salée.
Déjà les interventions pour rescaper la banque Bear Sterns, les sociétés de crédit hypothécaire, Fanny May et Freddie Mac, ainsi que le grand assureur AIG ont coûté des centaines de milliards au Trésor américain.
Un plan contesté
Le plan extraordinaire de sauvetage de 700 milliards de dollars, adopté au forceps par le Congrès pour racheter les mauvaises créances hypothécaires ou protéger les sociétés menacées de faillites, est loin de faire l'unanimité.
La crise survient en pleine campagne électorale. En plus de la présidence, un tiers des 100 sénateurs et les 435 membres de la Chambre des représentants font face à l'électorat au début novembre.
C'est à contrecoeur qu'une majorité d'élus a adopté un projet de loi d'abord perçu dans l'opinion publique comme une aide massive aux millionnaires de Wall Street, qui ont conduit le pays à la catastrophe.
Il devient donc difficile ensuite d'aller solliciter le vote des gens ordinaires qui écoperont de la facture.
D'autres ont évoqué leur conservatisme fiscal et leur foi en la libre entreprise pour dénoncer le projet.
Le représentant républicain du Texas, Jeb Hensarling, a même déploré que le gouvernement américain emprunte désormais la pente glissante du socialisme!
Pas étonnant qu'il ait fallu deux votes à la Chambre des représentants pour faire adopter le projet.
Faire passer la pilule
Pour dorer la pilule empoisonnée, on y avait ajouté des baisses d'impôts, mais aussi du « pork », littéralement du porc, pour graisser le processus législatif, dans la pure tradition des mauvaises habitudes des législateurs américains.
Pour voter en faveur d'un projet, un élu attache à la future loi, une annexe qui lui tient à coeur ou qui plaît aux lobbies qui financent sa campagne électorale.
Ainsi, les producteurs de rhum de Porto Rico ont obtenu de l'aide, tout comme certaines pistes de course automobile de la NASCAR et même les fabricants de flèches en bois pour les jouets d'enfants!
Des ajouts évalués à 150 milliards. Mais en dépit de ces adoucissements, les élus républicains de la Chambre des représentants n'ont jamais voté en majorité pour soutenir le plan présenté par leur président George W.Bush.
Il aura fallu que les démocrates assurent l'adoption de la loi
Une profonde humiliation pour le très impopulaire président sortant, dont le poids politique est pratiquement inexistant.
Un camouflet également pour John McCain, dont l'intervention auprès des élus républicains a eu peu d'effet, comme s'ils doutaient que leur candidat puisse l'emporter en novembre. Car pour le moment, la crise profite surtout à Barack Obama, du moins dans les sondages.
Mais rien n'est joué d'ici le 4 novembre, surtout si la déroute des marchés se poursuit ailleurs dans le monde.
Le futur président héritera d'un pays hyperendetté et très inquiet quant à son avenir.
Une majorité d'Américains croit désormais possible la répétition de la Grande Dépression de 1929, où un travailleur sur deux s'est retrouvé au chômage.
Croyez-vous que le plan américain de sauvetage sera suffisant pour endiguer une longue récession aux États-Unis et dans le monde?
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