ANIVERSAIRE DE L'ALTERNANCE : 9 ans après, l'incertitude

Lorsque, dans la nuit du 19 mars 2000, le Titanic socialiste, réputé insubmersible, a coulé après avoir heurté l’iceberg du Front pour l’Alternance (Fal), l’espoir était immense, les attentes démesurées. Et pour cause, Abdoulaye Wade, qu’un journaliste de Rfi appelait «l’opposant le plus célèbre d’Afrique», venait d’accéder au pouvoir, au terme d’un quart de siècle de combat acharné contre son vieil ennemi, le Parti socialiste. Aujourd’hui, 9 ans après, le Sopi, mythique slogan de Wade et naguère cri de guerre de la «jeunesse malsaine» qui s’est vengée de l’auteur de ces propos, ne fait plus recettes. Le Parti démocratique sénégalais (Pds) n’a pas réussi à vaincre l’autre Pds (Parti de la demande sociale) dont feu Pape Babacar Mbaye disait qu’il finira par avoir le dessus sur tous les autres. Le mal vivre est toujours d’actualité, le chômage reste endémique, la pauvreté s’accentue et les jeunes prennent le chemin de «barzakh». Au grand dam du «Messie» du 19 mars 2000 qui nourrit l’ambition de léguer son trône à son fils. C’est pourquoi, d’ailleurs, les élections locales du 22 mars prochain ont l’allure d’un référendum pour ou contre Wade et ses schémas. Le président de la République en est conscient, lui qui a décidé de mener la «dernière bataille du Sopi». Mais, le désenchantement des populations envers l’icône des «Alternanciers» est tellement profond que le tombeur de Diouf, à ses risques et périls, a l’obligation de jouer son va-tout. Cet ultime tour de piste, pudiquement appelé «tournée économique», aura néanmoins permis à Wade de mesurer la détresse des populations qui l’ont partout accueilli par des brassards rouges ou des jets de pierres. Pendant que son fils Karim, qui vient de goûter à l’amère expérience de «la fosse aux lions du terrain politique», affiche sa détermination à poursuivre sa route vers le sommet. Les revers subis par le président de la République, partout où il est passé, sont à l’aune des griefs portés contre lui, par ses compatriotes et qui ont noms : tripatouillage institutionnel, impunité, gabegie, recul de la liberté d’expression, monarchisation du pouvoir… En dépit des réalisations indéniables qu’il a faites sur le plan des infrastructures, de l’éducation, de la santé et du retour timide de la paix en Casamance.

A 72 heures des élections locales

Le 9e anniversaire de l’Alternance a ceci de particulier qu’il tombe trois jours avant le scrutin pour les élections locales. Ce qui veut dire que les Sénégalais vont sanctionner positivement ou négativement le bilan de Wade. Une situation qui confère à ces joutes leur importance, compte non tenu du fait qu’elles figurent parmi les élections les plus incertaines de notre histoire politique. On ignore presque tout du potentiel taux d’abstention et les risques de dérapage sont réels, si l’on en juge par les actes de violence qui ont émaillé la campagne électorale. Et nul doute que les résultats vont définitivement sceller le sort de la plupart des «monstres sacrés» de la scène politique nationale depuis les indépendances. Car, il sera très difficile pour les vaincus du 22 mars prochain de justifier leur maintien dans l’arène pour les combats de 2012 qui s’annoncent épiques. Et probablement, l’issue du vote stimulera l’émergence d’une nouvelle race d’hommes et de femmes politiques, plus jeunes, plus «propres» et plus enclins à écouter la voix du peuple. Cette fois, à la différence du 19 mars 2000, ce sera une véritable alternance générationnelle.