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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Politique

LA DYARCHIE AU SOMMET : Le n° 2 en question

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LA DYARCHIE AU SOMMET : Le n° 2 en question

La question du n° 2 pose assurément problème aussi bien au sommet du pouvoir, qu’au sein des formations politiques en général au Sénégal. Le Comité directeur du Parti démocratique sénégalais (Pds) a récemment « gommé » le poste du n° 2 du parti majoritaire, tandis que le n° 2 du pouvoir (le Premier ministre) est sujet depuis 2000, à une instabilité chronique, si ce n’est pas le président de l’Assemblée nationale. Suscitée pour amoindrir la force et le rôle du second ?

La cavale libérale contre Macky Sall, le président de l’Assemblée nationale, désormais ex-n°2 du Pds que l’on veut débarquer du perchoir où il vient à peine de s’installer à la suite des législatives de juin 2007 connaît une accalmie certaine depuis la révolte musclée « des déguerpis de la chaussée » du mercredi 21 novembre dernier. Une simple trêve en attendant que l’orage de la révolte des vendeurs à la sauvette de la capitale se calme ? On peut valablement le penser avec les projets de loi portant modification « encore » de la Constitution qui ont été avalisés par le Conseil des ministres du jeudi 13 décembre en attendant que la majorité au Parlement en fasse de même. Ces projets de loi une foi, votés, feront du président de la 3e institution de la République, un simple désigné annuellement. Serait-ce le cas pour l’autre président de l’autre chambre du Parlement ?

Le cas Macky Sall, même s’il ne procède pas encore jusqu’ici d’accusations « infamantes » de détournement de deniers publics et d’atteinte à la sûreté nationale, a quelques similitudes avec celui de son prédécesseur aussi bien à la tête du gouvernement et du poste de n°2 du parti, Idrissa Seck. Il est reproché aux deux hommes d’avoir tenté d’entretenir une dualité au sommet du pouvoir et du parti. Accusation qui leur vaut d’avoir été, tous les deux, bannis ou en voie de l’être.

Ces « cas libéraux » confirment cependant seulement la règle au Sénégal. De Galandou Diouf à Me Wade, aussi loin que l’on remonte dans la marche politique de notre pays, note le PR. Iba Der Thiam, 1er vice-président de l’Assemblée nationale en effet, « on observe que la question du n°2 n’a jamais cessé de se poser aussi bien au sommet du pouvoir qu’au sein des formations politiques. C’est le cas déjà entre Léopold Sédar Senghor et Abass Guèye son co-lister aux élections de 1951. L’alliance fit long feu. Bien avant cette alliance, on peut citer les cas : Galandou Diouf-Blaise Diagne. Les deux hommes se brouillent et deviennent des adversaires irréductibles après que le premier nommé a parrainé la venue en politique du second ».

Et l’Historien de poursuivre, « le même phénomène est observé entre Blaise Diagne et Lamine Guèye. Entre ce dernier et Senghor, qui quitte la Section sénégalaise de la Sfio pour, avec d’autres compagnons, aller créer le Bloc démocratique sénégalais (Bds) ». Pour Iba Der Thiam, « la question du n°2 ne se pose pas seulement au pouvoir, elle s’énonce également au sein des formations politiques ». Plusieurs partis politiques au Sénégal ont été en effet, confronté à la problématique du second et éprouvé l’adage wolof qui veut que deux béliers ne s’abreuvent pas en même temps dans le même réservoir d’eau. Est-ce la raison pour laquelle, la sociologue Mariama Touré parle « du mode de reproduction à la paramécie », en qualifiant les partis politiques au Sénégal, tant leur multiplication et leur naissance semblent emprunter à l’être unicellulaire, son mode de reproduction ?

Wade-Idy clone de Senghor-Dia ?

Si entre Léopold Sédar Senghor et Mamadou Dia, la dyarchie était consacrée par la loi fondamentale de 1960, elle s’expliquait également par le refus du président poète d’être en première ligne, a témoigné hier dimanche 16 décembre l’ex-directeur de cabinet du Président du Conseil de l’époque, Roland Colin sur les ondes de nos confrères de Radio futurs médias (Rfm) lors de l’émission hebdomadaire « Grand jury » de Mamadou Ibra Kane. L’auteur d’un récent ouvrage publié aux éditions Présence africaine et intitulé : « Sénégal notre pirogue, au soleil de la liberté » souligne que : « Lorsque les premières institutions ont été mises en place à la veille de l’accession du pays à l’indépendance, Mamadou Dia avait demandé au président Senghor de prendre la tête du gouvernement en tant que tête de file. Senghor avait refusé avec obstination, il voulait absolument que ce soit Mamadou Dia qui soit en première ligne ». Il a ajouté, poursuivant ses confidences autour d’un micro, « qu’il en avait été de même au lendemain du référendum de 1958 qui devait consacrer la formalisation de la volonté d’accession à l’indépendance. Mamadou Dia avait proposé au président Senghor d’être chef du nouveau gouvernement né de ce référendum, mais ce dernier refusa en désignant plutôt l’ancien Président du Conseil du gouvernement.

Tout comme après l’éclatement de la Fédération du Mali qui regroupait le Sénégal et l’ancien Soudan français. Mamadou Dia et ses amis voulaient que Senghor devienne la tête de file de la nouvelle politique ».

Selon lui, « c’est comme cela que s’est mise en place cette espèce de dyarchie-là entre un président de la République qui n’avait pas de véritables pouvoirs de gestion, plutôt de représentation, sauf en cas de crise majeure, et puis un chef de gouvernement qui était vraiment un chef de gouvernement ». On sait cependant ce qu’il est advenue de cette dyarchie. La crise de 1962 y mit un terme. Le président Dia et certains de ses compagnons tâtent dans la foulée de la rudesse des lits du pénitencier spécial de Kédougou, accusés d’avoir fomenter un coup d’Etat dont on peine jusqu’ici à étayer solidement et qui leur valut 12 ans de détention. Ismaïla Madior Fall, Pr. De Droit Constitutionnel à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) fait remarquer : « ainsi de 1963 jusqu’à la réintroduction en 1970 du poste de Premier ministre, le bicéphalisme au sein du pouvoir fut supprimé ». En réinstaurant le poste de Premier ministre en 1970, nonobstant ses précisions, Senghor consacrait à nouveau la dyarchie au sommet du pouvoir.

Certes, note le Constitutionnaliste, Abdou Diouf Premier ministre, « ombre parmi les ombres », ne fit point de vague. Mais Abdou Diouf ; président de la République, légitimé par le suffrage universel de 1983, supprime à nouveau le poste de Premier ministre qu’il ne réintroduit que huit ans plus tard en 1991 précisément. Retour de son « ami » de tous les jours, Habib Thiam aux affaires et entrée dans le gouvernement de majorité élargie de l’opposant Wade. Si la « période Diouf » n’est pas perturbée outre mesure par la dualité au sommet, celle, dite de l’alternance, est marquée par un dualisme réel ou supposé au sommet qui en affecte souvent dangereusement les institutions, ou, à tout le moins, les discrédite.

C’est ainsi que Idrissa Seck le maire de Thiès et l’actuel président de l’Assemblée nationale, Macky Sall, tous les deux, ex-n°2 du Pds ont éprouvé ou éprouvent l’ire du n°1 du parti et du pays, Me Abdoulaye Wade qui leur reproche de porter ombrage à son magistère. Si pour Senghor et Dia, soulignait le juriste et politologue, la constitution d’avant 1963 avait consacré le bicéphalisme, entre Wade et ses seconds, la contradiction est plus d’ordre politicien, car « il n’existe aucune discordance de la majorité ». Soit, mais la question du n°2 n’en demeure pas moins insoluble au sein du pouvoir au Sénégal.



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