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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
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Le Conseil constitutionnel face à l’histoire (Par Kadialy NOBA)

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Le Conseil constitutionnel face à l’histoire (Par Kadialy NOBA)
Kadialy NOBA
Juriste – Fiscaliste
Sénégalais de la Diaspora
***
Le Conseil constitutionnel face à l’histoire
Le Président de la République aurait saisi le Conseil Constitutionnel afin de lui signifier sa décision irrévocable de
quitter le pouvoir le 2 avril 2024, date de fin de son mandat alors que le nouveau Président n’a pas encore été
élu. Il faut dire que le Sénégal vit une situation politique dense, riche et inédite. Sur le plan juridique, la loi
fondamentale est éprouvée et passé au scanner (crible). Pour la deuxième fois en moins d’un mois, les sept sages
ont l’occasion de rendre une seconde fois une décision historique qui renforcerait la place du juge constitutionnel
en tant qu’organe de régulation des pouvoirs publics.
A la question posée au juge constitutionnel, trois réponses sont possibles.
i) Suppléance assurée par le Président de l’Assemblée nationale, la voie de la sagesse
Ce régime, prévu par l’actuelle Constitution en ses articles 31, 39 à 41, s’applique dans trois cas : la démission, le
décès ou l’empêchement définitif du Président de la République. Si les deux premiers cas ne peuvent souffrir
d’aucune ambiguïté quant à leur signification et sens, l’empêchement définitif n’a, à ce jour, fait l’objet d’aucune
interprétation de la part, ni des textes de la République, ni du juge constitutionnel. Dès lors, doit-on considérer
que le Président de la République est définitivement empêché dès le 3 avril 2024 compte tenu des dispositions
des articles 27 et 103 de la présente Constitution dont la portée est rappelée dans la décision du n°1/C/2024 du
15 février 2024 ? Autrement, la Présidence est vacante de droit car le Président de la République est
définitivement empêché de droit.
A notre avis, le conseil constitutionnel devra avoir une interprétation extensive de l’expression « empêchement
définitif » qui devrait permettre aux dispositions de l’article 39 de la constitution de trouver pleinement
application. En outre, le régime doit s’appliquer dans la mesure où il est strictement encadré par la Constitution.
En effet, les pouvoirs du Président de l’Assemblée nationale sont connus et encadrés par la Constitution. Dès lors,
il ne peut y voir de surprise quant aux actes administratifs qu’il peut prendre. Il s’exerce dans les limites précisées
par l’article 40 de la Constitution. A l’exception du pouvoir de dissolution de l’Assemblée nationale (cf article 87
de la Constitution), ses autres pouvoirs ne devraient susciter des inquiétudes. A cet égard, il ne peut nommer le
Premier ministre ou mettre fin à ses fonctions, encore moins soumettre un projet de loi au référendum.
Ce régime a l’avantage d’éviter à l’actuel Président de la République de pouvoir se prévaloir de sa propre
turpitude. En d’autres termes, un Président qui refuse de fait de fixer la date et donc d’organiser l’élection
présidentielle telle que prévue par la Constitution, ne puisse se maintenir en fonction tant que son successeur
n’aura pas été élu. La majorité des sénégalais et la communauté des juristes épousent cette position. Elle permet
de ne pas plonger le Sénégal dans l’inconnue.
En outre, l’esprit de séparation des pouvoirs irrigue notre Constitution serait préservée. Comme le disait
Montesquieu, « Pour qu’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir
arrête le pouvoir. ». Par la disposition des pouvoirs, l’assemblée nationale doit arrêter l’exécutif sous le contrôle
du pouvoir judiciaire.
ii) Maintien de l’actuel Président en fonction jusqu’à l’installation de son successeur, une solution
aventureuse
Ce régime trouverait sa base légale dans l’article 36 de la constitution lequel dispose que « Le Président de la
République élu entre en fonction après la proclamation définitive de son élection et l’expiration du mandat de son
prédécesseur. Le Président de la République en exercice reste en fonction jusqu’à l’installation de son successeur. ».
A l’évidence, cet article ne devrait trouver application que dans l’hypothèse où le mandat du Président en fonction
n’est pas arrivé à son terme alors que son successeur, déjà élu au mois de mars, attend sa prestation de serment
pour entrer officiellement en fonction. Ainsi, le Président en fonction continue d’exercer ses pouvoirs tels que
prévus par la Constitution jusqu’à la fin de son mandat. On est dans la normalité de l’exercice du pouvoir entre la
date de l’élection du nouveau Président au mois de mars et celle de sa prestation de serment en avril.
Rappelons que le Président de la République a illégalement arrêté le processus électoral en abrogeant le décret
convoquant le corps électoral. La loi constitutionnelle votée ultérieurement par l’Assemblée nationale pour
2
l’entériner a également été déclarée contraire à la constitution. La poursuite du processus électoral imposée par
le conseil constitutionnel n’a pas été suivi des effets escomptés. Le dilatoire mis en place Macky SALL depuis cette
décision du conseil constitutionnel est d’une évidence choquante. Le manque de diligence est patent. Depuis la
tenue du dialogue les 25 et 26 février 2024, les conclusions n’ont été transmises au Président que le lundi 4 mars
2024 / mardi 5 mars 2024, soit plus de 15 jours après la décision du conseil constitutionnel.
Le Président Macky SALL a expressément pris parti et est favorable l’application de l’article 36-2 de la Constitution.
Ce serait le comble de lui permettre légalement de se maintenir au pouvoir alors qu’il est le principal responsable
de cette situation. L’application de l’article 36 de la Constitution enverrait un mauvais signal. Ce serait la porte
ouverte à tout abus de pouvoir. Tout futur Président pourrait être tenté d’organiser, par sa propre carence, son
maintien au pouvoir.
Dans ces conditions, et comme il l’a rappelé dans sa décision n°1/C/2024 du 15 février 2024 (Considérant 19),
« le conseil constitutionnel doit toujours être en mesure d'exercer son pouvoir régulateur et de remplir ses missions
au nom de l'intérêt général, de l'ordre public, de la paix, de la stabilité des institutions et du principe de la
nécessaire continuité de leur fonctionnement. ».
Le conseil constitutionnel ne peut statuer dans ce sens. Lorsqu’il statuera, il devra prendre en compte les effets
de sa décision. Le principe de sécurité juridique devrait conduire à écarter l’application de l’article 36 de la
constitution.
iii) Régime jurisprudentiel « sui generis » défini par le conseil constitutionnel, l’affirmation du pouvoir
du juge constitutionnel
Si le conseil constitutionnel ne retient pas l’une des hypothèses ci-dessus, il devra, d’abord, constater la vacance
de la Présidence qui n’est pas prévue par la constitution. Autrement dit, il y a un vide juridique. Or, il ne peut
commettre un « déni de justice » puisqu’on est dans un système juridique où le juge constitutionnel ne peut se
dérober lorsqu’une situation présente devant lui n’est pas prévue par la loi.
Ensuite, il devra préciser le régime applicable au cas d’espèce. Enfin, il lui appartiendra de définir les contours du
régime (pouvoirs, actes administratifs).
Qui assurera la Présidence ? Le Premier ministre ? Le Président de l’assemblée nationale sous un régime différent
de celui prévu par la constitution ? Une autre autorité ?
A situation inédite, décision inédite.
En tout état cause, le conseil constitutionnel est face à l’histoire car sa décision marquera à jamais l’histoire
constitutionnelle et politique du Sénégal.


8 Commentaires

  1. Auteur

    En Mars, 2024 (13:38 PM)
    Mais d'où sort'il celui là !!!???? Encore un aigri !
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  2. Auteur

    Mignane Diouf Camp Des Gardes

    En Mars, 2024 (13:44 PM)
    Bonjour;

    Mon frére belle intervention, nous félicitons le CC pour leur responsabilité et engagement et lhistoire retiendra

    Pour vous je te souhaite une bonne carriére professsionnelle

     
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    Auteur

    En Mars, 2024 (14:25 PM)
    Il vient peut être du Gondwana ce mec, maintenant on a toure sortes d'individus au Sénégal qui se disent sénégalais 
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    Auteur

    Lol

    En Mars, 2024 (15:26 PM)
    Tu veux dire que ce genre d'intellectuels manquent au Sénégal ? Djangoulenn beugoulenn kou djangue
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    Auteur

    En Mars, 2024 (15:46 PM)
    De quelle ethnie svp ,  NOBA?
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    Auteur

    Djibril Diouf Camp Des Gardes

    En Mars, 2024 (16:11 PM)
    Merci Petit frère.

    Pertinent 

    Djibril 
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    Auteur

    Djibril Diouf Camp Des Gardes

    En Mars, 2024 (16:11 PM)
    Merci Petit frère.

    Pertinent 

    Djibril 
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    Auteur

    En Mars, 2024 (17:13 PM)
    J'imagine quand tu es petit, on te demande "quel métier tu veux faire quand tu seras grand"

    et tu dis "JURISTE CONSTITUTIONALISTE"   !!!

     

     
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