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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
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[ Contribution ] Le consensus politique : Un pré-requis à l’émergence économique

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[ Contribution ] Le consensus politique : Un pré-requis à l’émergence économique
Avec l’alternance politique exemplaire qu’il a connu le 19 mars 2000, le Sénégal est entré dans le club des grandes démocraties. Et dans une grande démocratie, la question économique est au centre du débat pour la bonne et simple raison qu’on y a réglé la question politique (consensus sur les règles du jeu). Le règlement de la question politique passe par un consensus fort. Le consensus politique est la principale entrave au décollage économique du Sénégal. Ce chaînon manquant de notre démocratie est pré-requis vers l’émergence. Au Sénégal, on consacre plus 90 % de nos idées et de notre énergie à la politique. L’émergence économique passe par l’inversion de cette tendance lourde comme le prouve l’exemple malaisien avec le programme Malaysia 2020. Ce consensus qui doit être notre rampe de lancement vers l’émergence devrait être naturel si on se base sur notre répertoire symbolique traditionnel qui nous enseigne deux choses : Senegal bene boppela ken manou khar niar ; Rerroo amoul niaka wakhtana am.

Etant donné que tous les Sénégalais sont convaincus que, d’une part, le pays est un et indivisible et que, d’autre part, il n’y a jamais de divergences mais toujours absence de dialogue, on peut en conclure que le dialogue est naturel chez nous. Donc c’est paradoxal que dans un pays qui a bâti son credo sur le dialogue que l’élite politique ait autant de mal à se parler. Que veut le président Wade : l’émergence du Sénégal ? Que veulent Moustapha Niasse, Tanor Dieng, Dansokho et Idrissa Seck : l’émergence du Sénégal. Considérant que tout le monde rivalise d’ardeur pour les intérêts du Sénégal, il est donc facile de s’entendre pour l’intérêt du Sénégal. C’est pourquoi je salue la dernière déclaration du président sur les assises. Le président est élu pour faire du Sénégal un pays émergent, si l’opposition par la réflexion peut y contribuer dans le cadre des assises, cela ne peut être qu’une bonne chose.

C’est pourquoi le président doit garder sa main tendue à l’opposition qui doit l’attraper au plus vite. L’autre main doit être tendue à la presse, si ce n’est déjà fait ; c’est à la presse de l’attraper vite, car on ne peut parler démocratie sans liberté de presse. La liberté de presse est une très lourde responsabilité, pour ne pas dire une très lourde charge, car elle est la condition sine qua none de l’exercice de toutes les autres libertés en démocratie.

Il est aussi de bon aloi de rappeler que le pouvoir ne va pas sans responsabilité. Et conséquemment plus on a de pouvoir, plus on a de responsabilité. La démocratie repose sur l’opinion, c’est pourquoi la presse y est un immense pouvoir. Il n’y a de démocratie sans opposition ni presse libre. Le président étant le garant du fonctionnement des institutions, le régulateur du jeu démocratique, devrait calmer le jeu pour mettre fin à l’emballement médiatique qui ne profite à personne et détériore gravement l’image du phare de la démocratie en Afrique. La main tendue du président vers son opposition et la presse est d’autant urgente et symbolique que nous sommes dans le mois béni du ramadan, mois par excellence du pardon et de la réconciliation.

Le pays aurait dû vivre dans l’ennui politique et la frénésie économique pour la bonne et simple raison qu’on a élu un président, une Assemblée et un Sénat. Donc sur le plan politique, on ne peut parler de crise politique ou institutionnelle, mais c’est le défaut de consensus qui fait qu’on a l’impression d’être dans une campagne électorale permanente. Une fois ce consensus trouvé, le pays pourrait se pencher sur deux questions essentielles : Economie et Education.

Sur le plan économique, le président a lancé le débat avec la Goana. C’était l’occasion d’un grand débat sur l’agriculture, secteur d’activité de plus de 70 % des Sénégalais, mais le débat politique a relégué au second plan ce débat essentiel pour notre avenir. Le Sénégal consomme annuellement 800 000 tonnes de riz et n’en produit que 100 000 tonnes, soit un gap de 700 000 tonnes. Le président a d’autant plus raison qu’aujourd’hui, il est avéré que seulement moins de 10 % de la production mondiale de riz est commercialisé, car les grands exportateurs sont devenus, à leur tour, importateurs. Et à court terme, on va arriver dans la situation surréaliste où on peut très bien avoir des devises, mais on ne trouvera pas de riz à acheter. Ce qui fait que la production locale n’est pas un luxe, mais une nécessité et c’est salutaire que le président anticipe et encourage déjà la production avec la Goana.

La Goana est d’autant plus révolutionnaire qu’elle corrige les erreurs de la Banque mondiale. Dans les années 90, c’est la Banque mondiale qui a encouragé l’importation du riz parce qu’elle estimait ‘que cela ne servait à rien de produire du riz local si on pouvait trouver moins cher à l’étranger’.

Aujourd’hui, le Sénégal paie par une crise alimentaire les mauvais choix de la Banque et la Goana est une courageuse tentative de rectification. Produire localement a un double avantage : les devises restent au Sénégal et atténuent ainsi le déficit de notre balance commerciale et deuxièmement l’argent investi pour la production va créer des emplois (production et distribution, commercialisation) et faire renaître des régions grâce à l’agriculture. Mais le meilleur argument est qu’on ne va plus dépendre de l’extérieur pour notre propre nourriture.

L’autre débat qui devrait mobiliser le pays est celui de l’énergie. Un pays ne peut pas émerger s’il ne règle la question de l’énergie, car l’énergie est la clé de la production donc de la croissance.

Le Sénégal ne peut pas faire l’économie d’un débat sur l’économie. Le président Wade a posé un débat et des actes avec sa politique d’infrastructures. Il y a d’autres débats comme comment avoir un taux de croissance à deux chiffres, comment faire pour reconstituer dans le cadre de l’Uemoa notre ’hinterland naturel’ qu’est une grande partie de l’Afrique de l’Ouest comme du temps de l’Aof ou comment faire du Sénégal un phare de la Finance, en Afrique de l’Ouest. Après l’alternance de 2000, sur la feuille de route que les Sénégalais avait remise à la classe politique, on pouvait lire : ‘Hisser le Sénégal à l’idée que les Sénégalais se font de leur pays’. Le débat aurait dû se résumer à une question : comment mobiliser notre énergie collective sur les vrais combats qui ont pour nom taux de croissance à deux chiffres, lutte contre la pauvreté, trouver une solution à la crise structurelle de l’université afin qu’elle sorte de la pénombre des grèves pour aller vers la lumière et se réapproprier ainsi son crédo : Lu mea lex.

Ibrahima DIAGNE Vice-Président de la Chambre de Commerce



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