Pour une première journée d’audiences, la deuxième session de la Cour d’Assises a livré des fortunes diverses pour les condamnés. Tant à Saint-Louis, Thiès et Dakar. Dans la capitale pour une affaire d’assassinat, le condamné s’en est tiré avec 15 ans de prison alors que dans la cité du Rail, le vieil éleveur qui comparaissait pour avoir achevé un gardien de verger à coups de coupe-coupe, après que son troupeau a dévasté le champ d’autrui, purgera douze ans en taule, après deux ans de séjour en prison. Même si, à Saint-Louis, la Cour a disqualifié l’affaire de meurtre en homicide involontaire, l’auteur a encore trois ans à passer derrière les barreaux pour une somme de 500 francs Cfa que sa victime n’a pas pu lui remboursé.
La peine de «15 ans de travaux forcés» qui vient d’être infligé par la Cour d’Assises à Ibrahima Diallo, accusé du meurtre de Mamadou Diaw, siffle encore dans ses oreilles. C’est à peine s’il a pu prononcer ces mots : «Je suis triste, je ne pensais pas qu’il écoperait d’une peine assez lourde.»
Un de ses avocats, Me Abdourahmne Sô dit Lénine, se dit «triste, eu égard au comportement d’Ibrahima, qui a fait preuve d’amende, mais aussi à sa bonne foi. Il a toujours dit qu’il va respecter toute décision, quel que soit le verdict de la Cour».
Regagnant le box des accusés, Ibrahima Diallo, qui a déjà passé plus de 7 ans en prison, à l’annonce du verdict, qu’il a écouté religieusement, a murmuré du bout des lèvres : «Allah est grand !» Il a voulu afficher l’assurance, malgré son visage triste d’où ruissellent quelques gouttes de larmes. Il a ensuite fait un signe de main, à sa jeune sœur Oulymata Diallo profondément éplorée. Cette dernière à côté de sa tante Madame Kane et de son jeune frère Zakaria Diallo, a versé toutes les larmes de son corps. Elle se dit choquée de voir son frère devoir passer encore «8 ans en prison alors qu’il est un soutien de famille». Elle a jugé le verdict «dur», à l’image de sa tante, qui est d’avis que «c’est vraiment excessif». Elle se dit surprise par ce verdict après que les «brillantes plaidoiries des avocats ont démontré les failles du dossier, surtout le rapport de l’enquête de personnalité». En effet, les avocats de la défense Me Abdourahmane Sô «Lénine» et El hadji Basse, ont axé leurs plaidoiries sur la préméditation et l’intention.
D’après Me Sô, on ne saurait parler de préméditation, si l’on sait qu’entre la maison d’Ibrahima Diallo, peu distante du lieu du crime et le temps mis pour retrouver sa victime, il ne peut y avoir de «temps de préparation, qui consiste à aiguiser un couteau et venir le tuer». Le délai et l’espace sont trop courts pour parler de «préméditation». C’est ce qui est aussi valable pour l’acte «d’intention». Car, cela ne peut être retenu dans ce cas d’espèce, si l’on sait que le certificat de genre de mort produit, n’indique nullement «le nombre de coups portés, mais plutôt des plaies cutanées». Or, tonne Me Abdourahmane Sô, dans de tels cas, il est impératif de donner «les nombres de coups et la profondeur des blessures».
Me Sô a essayé aussi de titiller les sentiments de la Cour en faisant ressortir le caractère social d’Ibrahima Diallo. Ce dernier «a été toujours présent à côté de ses parents. Son père lui confiait la pension de retraite pour assurer la dépense de la famille qu’il complétait avec son travail de rabatteur». Conscient de la «modeste situation dans laquelle se trouve sa famille, il a très tôt abandonné l’école pour aider sa mère en vendant des crèmes glacées», a dit Me El hadji Basse. Ses parents «vont mourir quelques années après son emprisonnement, car ne pouvant plus supporter de voir leur fils incarcéré», a dit l’avocat.
La défense n’a pas semblé convaincre la Cour, qui a condamné Ibrahima Diallo à 15 ans de prison.
0 Commentaires
Participer à la Discussion