Pour une leçon inaugurale, Nicolas Sarkozy n’a pas eu droit hier, à l’Ucad II, à des ovations à la fin de son discours. Parce qu’une grande partie de son auditoire n’a pas du tout apprécié de le voir ainsi s’ériger en donneur de leçons.
La leçon dite inaugurale d’hier de Nicolas Sarkozy, si c’en est une, n’a pas eu l’effet escompté. Le propre d’une leçon est d’être retenue et assimilée.
Or, après le dernier mot prononcé dans son speech, le président français n’a pas eu droit au standing ovation qui sied en pareilles circonstances. C’est à peine si des étudiants, exacerbés, n’ont pas été tentés de le huer. La mine peu réjouie de nombre de personnes au sortir de la salle de l’Ucad II en dit, aussi, long sur la réception mitigée que le discours a eu auprès de l’assistance.
C’est que Sarkozy a vraiment pêché. Emporté par sa fougue caractéristique et ses vérités crues, l’hôte du Sénégal a fait plus dans le dénigrement qu’il n’a cherché à convaincre encore les sceptiques quant à ses capacités à changer le cours de l’histoire, en apportant une nouvelle orientation dans les relations entre son pays et le continent noir et que les Africains plus que les Français appellent de leur vœu. Hélas, le théoricien de ‘l’émigration choisie’ a donné raison à ceux qui doutaient qu’il venait chez nous, non pas pour échanger et voir ensemble comment rendre plus fécondes et dans un respect mutuel, les relations séculaires entre la France et l’Afrique, mais pour tenter de nous humilier. En fait, c’est ainsi que nombre d’universitaires et étudiants présents à l’Ucad ont perçu l’exercice auquel s’est livré hier l’hôte du président Wade.
Comment dans ce prestigieux temple du savoir où d’éminents intellectuels français ont contribué à former d’illustres fils du continent et qui font aujourd’hui la fierté de l’Afrique entière, Sarkozy a-t-il osé soutenir que nous portons en nous les germes de l’anti-développement, se sont demandés bien des membres de son auditoire. En fait, ainsi que l’ont souligné des universitaires présents dans l’amphithéâtre, le président de la République française ne connaît pas l’Afrique. Sinon, croient-ils savoir, il n’aurait pas considéré que, dans notre ‘univers où la nature commande tout’, nous restons, nous autres Africains, ‘immobiles au milieu d’un ordre immuable où tout est écrit d’avance’. Aberration ne pouvait être plus infâmante, à leurs yeux.
Pourtant, parmi les illustres personnes l’ayant accompagné dans son périple africain, il y a une Sénégalaise bon teint qui occupe un poste stratégique dans le gouvernement français, mais aussi reste au cœur de son dispositif politique. Ou faut-il finalement croire que Rama Yade n’est là que pour amuser la galerie, mais pas du fait d’une compétence avérée. Combien, en outre, sont-ils, ces Africains à se hisser au rang des meilleurs de ce monde ? Ou encore combien sont-ils ces jeunes génies natifs de l’Afrique qui n’ont pu assurer leur épanouissement intellectuel du fait d’un système éducatif imposé en contrepartie d’une aide étrangère ?
Sans vouloir faire l’apologie de la violence en Afrique, est-ce vraiment l’apanage du continent noir, ainsi qu’a semblé le soutenir Nicolas Sarkozy. A-t-il oublié les massacres de Serbie ? Sont-ce les Africains qui s’entretuent en Irlande du Nord ? N’y a-t-il pas d’autres foyers de tension en Europe ou ailleurs qu’en Afrique ?
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