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Politique

VICTOIRE DE WADE : Vote de Groupes Contre les Sentiments Individuels

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VICTOIRE DE WADE : Vote de Groupes Contre les Sentiments Individuels

Il y a de cela deux ans, un de mes petits frères parlant d’un autre plus jeune de la famille disait que « si Abdoulaye avait fait arrêter notre père pour avoir souri devant le président, le benjamin dirait certainement « ‘Paabi mooko def moomit. Lumuy muun ? (C’est la faute de notre père, quand même lui aussi, pourquoi il sourit ?’) » 

Le frère qui signifie ainsi le soutien sans faille du plus petit, parle encore de sa propre position vis-à-vis de Wade. Il garantit que s’il se fiait à ce qu’il pense de la gestion du pays par Wade, pour rien au monde il n’aurait voté pour le candidat la Coalition Sopi 2007. Pourtant il a bel et bien voté pour lui.

Le frère en question est pourtant un grand intellectuel (non traditionnel certes) mais il n’a pas pu dépasser sa conviction de groupe pour choisir en fonction de ses sentiments individuels. Et cette attitude va au-delà de ce qui est appelé traditionnellement le Ndiguel. Abdoulaye Wade a mené sa campagne pour gagner le suffrage de la majorité des Sénégalais par des votes de groupes.

Dés le mardi 20 mars 2000, après avoir reçu le coup de fil libérateur de Abdou Diouf, le félicitant de sa victoire, il se rend immédiatement à Touba pour signifier son allégeance à la communauté Mouride. On peut penser que c’est par conviction. Mais pour les talibés, Wade leur donnait déjà un autre rendez-vous électoral. Et depuis, cette attitude est renforcée par le vieil opposant chaque fois que l’occasion lui en est donnée.

Cette démarche a, comme qui dirait, fixé ce groupe électoral dans le camp du Sopi malgré les secousses qui ont marqué la vie de son parti à Touba durant son premier septennat. Voilà une ville qui, symboliquement, représente un intérêt majeur pour le président sortant et dans laquelle il n’a pas pu trouver un seul dirigeant pour le mettre à la tête de son parti, le Pds. Ce n’est qu’à la veille du scrutin que le candidat Wade est allé débaucher Abdoulaye Babou, un militant de l’Afp qui n’avait pas encore fait preuve de sa popularité dans sa propre ville de Mbacké, pour lui confier la direction locale du Sopi.

Pourquoi alors Wade n’a pas été sanctionné par la base et les dirigeants de son parti qui pouvaient se sentir trahis ? C’est parce que le chef de l’Etat est arrivé à établir un lien direct avec les électeurs mourides, lien qui enjambe les croix de transmission politiques. Tous les marabouts intermédiaires n’ont pu coûter ou valoir un nombre important au candidat du Sopi.

Ou est le poids de Cheikh Bethio Thioune et Serigne Modou Kara Mbacké à Thiès, le seul endroit ou le vote des intérêts locaux a bien fonctionné, si le rôle des poids intermédiaires signifiait grand chose ? A Touba et à Mbacké, les appels au vote sanction étaient plus nombreux que les appels en faveur du candidat sortant. Et Wade le savait depuis le début de son mandat. Il n’a pas vraiment cherché à soigner ses relations avec les « petits fils ». Il a plutôt concentré ses forces à montrer l’image du leader temporel d’un âge avancé qui se soumet à un leader religieux lui-même d’un âge avancé. Ce qui suggère donc qu’il ne peut y avoir d’intermédiaires.

Les Mourides ne sont pas les seuls que Wade à cherché à gagner sur la base de leur conviction de groupe. Abdoulaye Cissé, le correspondant de la radio African Time de New York à Paris, disait que le vote largement favorable à Wade dans la capitale française doit beaucoup au soutien que le Président à fourni à la communauté halpular de cette ville, à l’occasion du décès de Thiérno Mansour Barro. Il faut rappeler que le marabout vivait 9 mois sur 12 dans l’Hexagone et était très respecté dans cette communauté.

Il est clair que Linguère n’est pas une ville différente des autres grands centres du Ferlo. Et pourtant, cette ville a toujours voté Djibo Kâ depuis sa séparation avec le Parti socialiste. Ce n’est certainement pas un vote basé sur des intérêts individuels, mais ici aussi, le vote de groupe a bien fonctionné pour Djibo Kâ qui l’a transvasé dans l’escarcelle de Wade. Ce vote de groupe est utilisé à la perfection par Wade en milieux Pulaars (ethnie principalement venue du Nord du Sénégal). A Matam, nouvelle région restée diminuée au plan des investissements avec donc de multiples raisons de mécontentements vis-à-vis du pouvoir, le vote de groupe est entraîné par la transhumance de tous les leaders politiques de la région.

La preuve en est la différence en termes de taille de la victoire Wade entre Matam est Podor. Aissata Tall Sall est restée avec Tanor et le vote de groupe est éclaté malgré la similarité des situations sociaux-économiques et ethniques des deux parties du Fuuta.

Un responsable des partisans de Robert Sagna à New York disait hier que seule la région de la Casamance n’a pas voté sur la base de l’intérêt du groupe. Sinon, Robert Sagna aurait du engranger plus de voix. Mais pour ce responsable, la Casamance, en particulier chez les Diolas, n’est pas une société hiérarchisée. C’est presque valable pour les toutes sociétés frontières, selon Cheikh Anta Diop.

L’attitude du vote de groupe symbolisé par Touba, Mbacké et Diourbel ne s’est pas limitée dans cette région du Baol. Malgré les efforts importants déployés à Nioro, Niasse reste fort. A Médina comme à Thiénéba, quand un membre du groupe à cherché à agir en solo, le groupe a voté contre son candidat.

Si le vote de groupe n’avait pas joué un grand rôle, Tivaoune et ses environs allaient sanctionner Idrissa Seck. On se rappelle les multiples récriminations des autres villes et villages de la région de Thiès à propos de la concentration des ressources financières destinées à cette région lors de la célébration de la fête de l’Indépendance 2004.

Pour des phénomènes aussi complexes que l’analyse du vote de plus trois millions de Sénégalais, il ne peut y avoir une seule raison, ou même une raison dominante. Bien entendu, le fil qui a permis de coudre toute cette alliance gagnante pour le chef du Pds, c’est l’argent. Beaucoup d’argent.

Mais même là, ce nerf de la guerre est mis au service de la consolidation du vote de groupe. Contrairement à la pratique jadis appliquée par les Socialistes qui consistait à distribuer des sacs de riz aux villages durant la campagne électorale, Wade a plutôt utilisé l’argent pour s’assurer l’appui des leaders de groupes ; du sommet de ces groupes jusqu’au niveau local. N’a-t-on pas parlé de 50 millions de Fcfa et des 4 + 4 gracieusement offerts aux Khalifes généraux des familles religieuses de taille moyenne ?

Il serait intéressant d’étudier un jour le rôle que joue l’argent en politique et voir sa réglementation. A quoi sert une loi qui interdit l’acceptation de financement extérieur aux partis politiques si elle n’est pas accompagnée de moyens de contrôle des sources de revenus de ces mêmes partis ?



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