Dimanche 28 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Societe

Contribution : Les télé- novélas ou la domination culturelle

Single Post
Contribution : Les télé- novélas ou la domination culturelle

Depuis quelques années, nos chaînes de télévisions nous bombardent de télé novélas qui sont des films produits en Amérique latine. Ces productions cinématographiques occupent une place importante dans nos grilles de programmes au détriment des émissions à valeur éducative et instructive. C’est devenu un phénomène qui se développe comme une métastase et prend ainsi des portions inquiétantes sur l’essentiel du Continent africain.

19 h 30, les gens sont accrochés à l’écran, les rues sont désertes et les activités tournent au ralenti. C’est le moment de suivre un épisode de «Barbarita ou les couleurs de l’amour», «Clap» ou «La femme de Lorenzo» et cela continue jusqu’à 22 h suivant les chaînes où ils passent. Ce regain d’intérêt pour ces films nous pousse à nous interroger sur un certain nombre de questions qui ne cesse de nous triturer les méninges.

Qu’est-ce qui explique ce goût immodéré chez les peuples africains pour les films au rabais, qui relatent tous les mêmes histoires ? Quelle est la valeur (cinématographique) de ces films ? Quelles sont leurs conséquences sur le plan social, culturel et économique ?

«Rosa», «Clap», «Milagro», «Marimar», «Luz Clarita», «La femme de Lorenzo», «Destins croisés», que sais-je encore, sont tous construits autour du thème de l’amour entre personnes de classes sociales différentes. Amour qui se heurte à des oppositions de tous ordres. Les deux personnages centraux ont en face d’eux des adjuvants, mais surtout des «challengers» qui entreprennent toutes sortes d’intrigues pour faire capoter la relation, qui finit toujours par triompher.

En fait, le constat largement partagé est que ces films sont monotones et le modèle du script laisse peu de place à des suspenses et rebondissements qui donnent un «goût d’inconnu» à la suite. La trame est toujours identique avec de rares variations sur le fond. Malgré le caractère fade de ces films, les télévisions africaines, en rude concurrence, en font leurs choux gras. La seule explication est que les chaînes de télévisions sont sous le diktat des téléspectateurs, surtout les filles qui en sont si friandes. Des films qui ne reçoivent jamais de primes lors des salons du film ou festivals prestigieux comme celui de Cannes ou la Mostra de Venise. Ils figurent tous au bas de la classification des films.

Sur le plan social, ces films encouragent des changements de comportement perceptibles chez les jeunes qui reproduisent par mimétisme les façons de faire de ces personnages. Une situation favorable à la domination culturelle, véhiculée à travers ces genres de productions cinématographiques.

Cette forme de domination a été fermement dénoncée par les tenants de l’école de Francfort (Habermas, Adorno, Marcuse, Horkheimer) qui y voient un moyen pour l’Occident d’asseoir sa domination et d’étendre son impérialisme culturel. Ces films sont des moyens redoutablement efficaces qui permettent aux Occidentaux de faire une sorte de «lavage des cerveaux en liberté». Car, c’est à travers eux qu’ils font adopter, de façon aveuglante, aux peuples dominés, leurs manières de penser, de sentir et d’agir. C’est une domination d’autant plus grave qu’elle se passe sous l’illusion de la liberté, autrement dit, sous la forme d’une «violence symbolique», pour reprendre P. Bourdieu. Cette forme de domination dissimule les rapports de force sous-jacents et entraîne de profondes mutations dans nos représentations de la réalité. En plus de ces aspects, ces films coûtent cher.

Qu’est-ce qui empêche nos dirigeants de promouvoir la production de films africains qui véhiculent nos idéaux et nos valeurs locales. Des émissions comme «Regards», «Téléscopie», «TGP», nous manquent, hélas. Que faire de ce vivier de films et documentaires produits par de jeunes réalisateurs formés au Forut Média Centre de Dakar. La mondialisation, c’est aussi la bataille des contenus, la guerre des images. L’enracinement et l’ouverture, n’est-ce pas, disait Léopold Sédar Senghor.

 



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email