Projet d'agrandissement de la canalisation de Cambérène : Le khalife dit sa frustration à la délégation conduite par Adama Sall

Le guide des Layènes n'a pas caché hier sa déception face à l'attitude du gouvernement envers sa cité religieuse. Et au-delà de l'épineuse question de la station de pompage des eaux usées qui a fini d'étouffer Cambérène, Abdoulaye Thiaw Laye veut que l'Etat fasse preuve de plus d'égard à l'endroit de la cité.

Le khalife général des Layènes, Abdoulaye Thiaw Laye, n’est pas du tout content des agissements du gouvernement concernant le projet d’agrandissement de la canalisation de la station d’épuration du croisement Cambérène qui passe par ledit village pour évacuer les eaux usées à 200 mètres dans l’océan. Selon une source proche du khalife, qui a assisté à la rencontre, qui a réuni hier, outre le ministre de l'Assainissement et son cabinet, le commandement territorial, la direction générale de l’Office national de l’assainissement du Sénégal (Onas), le maire de Cambérène, le chef de village de Cambérène et son adjoint, le guide Abdoulaye Thiaw Laye a dit toute sa frustration à la délégation conduite par Adama Sall, chargé aussi de l’Hygiène publique. ‘Le khalife a dit tout son mécontentement à la délégation parce que le gouvernement n’a pas respecté le protocole de novembre 2000 entre le gouvernement et la population de Cambérène, dans lequel le gouvernement s’engageait à prendre des mesures d’accompagnement pour aider les populations à faire face aux éventuelles conséquences négatives qui découleraient de la canalisation, comme les maladies et l’insalubrité’, rapporte notre source. Notre interlocuteur ajoute également que le guide Abdoulaye Thiaw Laye s’est insurgé contre ‘le délaissement’ dont est victime le village de Cambérène qui n’est pas logé, selon lui, à la même enseigne par rapport aux autres cités religieuses. ‘Cambérène, la capitale de la communauté layène, ne mérite pas le traitement qu’il subit. Notre cité est laissée en rade par les autorités. Parce que depuis l’alternance, depuis 2000, rien n’a été fait sur le plan des infrastructures’, aurait ajouté le khalife. Ce dernier est d’autant plus frustré, indique notre source, qu’il est ami du président de la République depuis de longues années. En effet, d’après notre source, le khalife des Layenes a informé à la délégation que le président de la République et lui ont séjourné dans la même chambre pendant leur service militaire. ‘Mieux, le bon Dieu a fait que Abdoulaye Wade est devenu président de la République et moi Khalife général des Layènes à la même époque dans le même pays, le Sénégal’, aurait dit le khalife. Il aura également expliqué à la délégation que le village a toujours été propre ; et que la canalisation a rendu la plage insalubre avec les eaux qu’elle y déverse.

Les populations de ce village manifestent contre ce projet d’un coût de six milliards de francs Cfa, financé par l’Union européenne. Elles rejettent ce projet parce que, à les en croire, le gouvernement n’a pas respecté ses engagements. Pire, toujours selon les populations, le village ne bénéficie pas d’un système d’assainissement.

Trois questions à… Adama SALL, Ministre de l’Assainissement et de l’Hygiène publique : Nous voulons l'appui du khalife pour la continuation du projet d'émissaire

Wal Fadjri : Quel est l’objet de votre visite auprès du khalife général des Layènes ?

Adama SALL : Je conduis aujourd’hui une délégation de mon cabinet, avec le commandement territorial, le préfet, le sous-préfet et la direction générale de l’Office national de l’assainissement du Sénégal (Onas) pour solliciter ses prières et aussi lui demander son appui pour la continuation de ce projet important. Nous lui avons assuré et nous voulons, en présence du maire de Cambérène, du chef de village de Cambérène, de son adjoint, rassurer les populations que nous nous inscrivons dans la dynamique de l’accord de novembre 2000, qui comporte trois aspects essentiels. Le premier, c’est de ne plus déverser les eaux usées sur les plages de Cambérène avec la construction d’un émissaire de 1 700 mètres au lieu de 200 mètres. Donc, vous voyez la différence, elle est déjà appréciable.

La deuxième chose, c’est d’aller vers le traitement tertiaire des eaux avant de les jeter en mer. Nous avons reçu des instructions fermes du président de la République de traiter les eaux usées avant de les déverser en mer. La troisième chose, c’est de continuer le programme d’assainissement de Cambérène autant en eaux pluviales qu’en eaux usées domestiques. Voilà trois aspects fondamentaux sur lesquels nous allons discuter avec les populations pour les rassurer. Nous allons continuer à nous concerter avec les populations. D’ailleurs, nous avons pris rendez-vous avec elles après le Maouloud.

Wal Fadjri : Mais la population demeure réticente au projet de construction d’un émissaire...

Adama SALL : C’est normal parce qu’il y a des incompréhensions. Les notables du village l’ont évoqué, en disant qu’il n’y a pas eu suffisamment d’explications; qu’il n y a pas suffisamment de concertations ; des assurances n’ont pas été données à la population. Les promoteurs du projet ont manqué d’assurance vis-à-vis des gens de Cambérène, parce qu'il s’agit de faire comprendre aux populations que le projet que nous avons est dans leur intérêt exclusif. C’est pour leur éviter les problèmes de pollution et l’apparition de certaines maladies dues aux eaux usées.

Et c’est la raison pour laquelle le gouvernement a dit qu’il faut appliquer le protocole de novembre 2000 et l’amener l’émissaire beaucoup plus loin. Au lieu de 200 mètres, nous allons l’amener à 1 700 mètres ; c’est vraiment dans les normes internationales. Et je vous assure que nous allons respecter les normes internationales et même aller au-delà.

Wal Fadjri : Etes-vous parvenu à convaincre le khalife général des Layènes ?

Adama SALL : Le khalife général des Layènes nous a bien compris. Il nous adit que sa préoccupation principale est la préservation de la salubrité et de la santé du village de Cambérène qui est une cité religieuse. C’est de faire en sorte que Cambérène, qui est la capitale de la confrérie layène, un village de pèlerinage, un sanctuaire musulman reconnu, que l’environnement soit préservé. Et nous lui avons donné toutes les assurances allant dans ce sens.